Le Wrap Up de la semaine où on s’est re-reconfiné (semaine du 29 mars 2021)
5 bullet points : média, tech, société
Pâques et reconfinement sont un très bon combo pour justifier que vous ne recevevez le Wrap Up que mardi matin, nous devrions retrouver un rythme régulier dès la semaine prochaine.
Au sommaire de cette semaine de début de la saison 3 :
Ecouté 🔊 : Spotify se veut le leader de l’audio
Eveillée 🧘 : Salesforce ouvre des espaces de pleine conscience dans ses locaux
Surveillée 🕹️ : les limites de la gamification de la finance
Casqué ⛑️ : comment nos normes sociales évoluent
Flagué 😂 : la Comédie Française reprend Desproges
Ecouté 🔊 : Spotify se rêve en leader de l’audio
Le temps s’est accéléré ces derniers mois sur planète audio (l’année 2020 aura vu 106 millions de nouveaux abonnés rejoindre les plates-formes) : Spotify à qui l’on promettait un destin funeste lorsqu’Apple s’est lancé à sa poursuite en 2016 en lançant Apple Music, se rêve désormais en leader de l’audio (155m d’abonnés payants pour 345m d’actifs par mois) .
Il faut dire que le vent a désormais tourné, et un millier de développeurs dédiés ont permis à la firme suédoise de repasser devant la pomme aux Etats-Unis :
Bruno CROLOT, DG France de Spotify, était l’invité de France Culture dimanche soir dans l’émission Softpower. L’émission est revenue sur la nouvelle donne économique pour les maisons de disque induites par le poids grandissant des plates-formes de streaming (83% de leurs revenus).
On a déjà parlé de la modification intrinsèque de la musique liée aux formats favorisés par les plates-formes; dans l’émission on apprend l’intense traffic qui se joue en coulisses dans le business des playlists (4 milliards de playlists rien que sur Spotify) : en effet, les maisons de disque se font rémunérer au nombre de streams de leurs artistes, certains petits malins ont donc compris l’intérêt de faire le travail de marketing à leur place et de le monétiser ensuite auprès d’elles. Ainsi, on comprend mieux les publicités à répétition sur d’autres réseaux sociaux pour écouter ces playlists sur les plates-formes.
Les éditeurs de ces dernières, comme Sumitted ou Spotlister (depuis fermé pour violation des conditions générales de la platforme), demanderaient environ 2 000 € pour référencer une chanson dans l’une de leurs playlists de quelques milliers d’abonnés, sans parler de cette autre déviance : les “fermes d’écoute” où des bots font tourner des abonnements sans auditeurs, aussi appelés “fake streams”.
Pourtant à ce petit jeu (celui des playlists), Spotify n’est pas en reste : il a proposé, lors d’une expérimentation en novembre dernier, une promotion ciblée pour les artistes sur la plateforme contre un ristourne sur la rémunération versée à la maison de disque. Au global, les revenus devraient croître pour la maison de disque.
Parmi les autres nouveautés reprises, celle du lancement cette semaine des playlists hybrides reprenant musique et podcast favoris dans ce qui ressemble à s’y méprendre à une tranche radio…
Autres annonces dignes d’intérêt en passant, le lancement en coproduction avec le Monde du “Le Daily” dont on peut se dire que le but est de rencontrer le même succès que le titre du même nom du New York Times (4 millions d’auditeurs quotidiens!) et le rachat de la société Locker Room il y a 6 jours pour accélérer dans le live audio (versant plutôt “parlé” pour rivaliser avec Clubhouse que de se mesurer avec Livenation).
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Eveillée 🧘 : Salesforce ouvre des espaces de pleine conscience dans ses locaux
L’information n’est pas nécessaire neuve, mais elle détonne. On connaissait les salles de repos (surtout dans les hopitaux, un peu moins dans les entreprises), les journées sans mail ou encore les vertus de la marche appliquées à l’entreprise, dont les Co-walk1, mais là Salesforce pousse un cran plus loin avec la création d’espaces de pleine conscience (mindfulness spaces) où le téléphone portable et les interruptions intempestives de mails sont donc proscrits.
Cependant ce qu’explique l’article de Makeit c’est qu’il ne s’agit pas d’une expérimentation anodine mais bien d’un alignement avec les valeurs poussés par le groupe et la volonté de promouvoir un état d’esprit de « débutant » au sens de la philosophie zen, le « shoshin » étant censé garder une ouverture et une absence de jugement quand bien même sa connaissance d’un sujet s’approfondirait.
Ça n’est pas la première fois que la Californie marie philosophie orientale et management, le patron de Salesforce, Marc Benninghof se posant en digne héritier de cette tradition :
More than half of Salesforce offices have a “mindfulness zone” on each floor, where employees set their phones aside and take a quiet moment. It’s to promote clear thinking and innovation, says Benioff.
Surveillée 🕹️ : les limites à la gamification de la finance
C’est un fait entendu, il faut mettre de la gamification partout, et surtout dans les domaines sérieux, souvent affublés du qualificatif de rébarbatif : dans l’éducation évidemment, dans le travail c’est entendu et depuis pas mal de temps dans la finance et plus précisément dans le courtage.
On a déjà parlé ici de l’avénement de l’investisseur-consommateur (retail investor), ce jeune Américain qui s’ennuit sur son canapé et qui fort de son chèque de Stimulus Package dans la poche se dit que la bourse pourrait être fun. On a déjà souligné le rôle qu’a joué dans cet avénement de l’app Robin Hood : l’app use de mécanismes de gamification et de gratification comme des explosion de confettis sur l’écran lors de l’inscription, d’un ordre de bourse passé ou d’un parrainage, plus globalement à chaque “passage de niveau”. On a vu ainsi l’app encourager les utilisateurs à se connecter plus de 1000 fois par jour pour remonter dans la liste d’attente d’accès à un compte bancaire rémunéré.
Avec le succès qui s’en est suivi en termes d’ouvertures de compte :
Le blog C’est pas mon idée, nous apprend que le régulateur a décidé d’y mettre un terme : une plainte de l’Etat du Massachusetts met en exergue cette pratique, en des termes peu flatteurs, comme un exemple de stratégie déployée afin d'attirer les investisseurs novices.
Ainsi, une autorité de régulation a décidé de faire usage du pouvoir duquel elle était investi, pour siffler la fin de la partie, et rappeler que l’investissement financier est une discipline sérieuse, qui s’apprend, s’encadre et assume le risque de ne pas souscrire à la hype de la gamification.
Il faut croire que la menace est suffisamment sérieuse pour l’app préfère adopter préventivement des mécanismes plus discrets avant d'être explicitement accusée de stimuler l'addiction au boursicotage. Qu’on en juge par ce design plus “sobre” :
Casqué ⛑️ : comment nos normes sociales évoluent (un peu)
Seth Godin est un des gourous du marketing moderne, il est notamment l’auteur de Permission Marketing et de Purple Cow. Dans son podcast Akimbo, il revient sur nos conditionnements culturelles en prenant l’exemple de l’évolution du port de casque au Hockey sur Glace.
Quiconque a déjà vu de près une rencontre de ce sport violent, admettra que les joueurs ne se font pas de cadeaux et le port du casque est un indispensable de la panoplie du joueur moderne. Pourtant, Seth Godin revient sur l’incroyable histoire de la réglementation du port obligatoire du casque et du temps qu’il a fallu pour qu’il rentre dans les moeurs (jusqu’au récit hallucinant de ces joueurs du monde d’avant qui ont, de mauvais gré, accepté de porter le casque mais qui ont ostensiblement refusé d’en accrocher la jugulaire, ce qui revient à rendre beaucoup moins opérante cette protection, histoire de bien signifier qu’ils n’étaient pas des mauviettes) ;
In the early days of hockey, there were no helmets, facemasks, or any sort of protective equipment, it just wasn’t anyone’s top priority. Not surprisingly, facial lacerations, concussions, and other head injuries were pretty common. It was rare in those days to see an NHL player who wasn’t missing a few front teeth.
The first hockey player to regularly wear a helmet was George Owen when he played for the Boston Bruins from 1928-29. Back then, helmets and protective gear weren’t required to play the game. In fact, due to peer and fan pressure, many players felt ridiculed and ashamed to wear a helmet.
Ce qui se joue derrière cet exemple frappant, c’est le très lent mouvement de nos sociétés pour faire évoluer collectivement les mentalités, et la très rapide accélération passée le point de bascule.
Cet exemple du casque de hockey peut aujourd’hui s’appliquer à biens des domaines, à commencer par la ceinture de sécurité dans les voitures, ou encore la disparition progressive de la cigarette dans les lieux publics.
Il est intéressant d’essayer à cet exemple, de considérer ce qui dans 20 ans, paraîtra abérrant à nos enfants et qui ne nous choque nullement aujourd’hui : notre comportement écologique très certainement sera brocardé, sans doute la place que nous laissons aux écrans d’ordinateur et de téléphone ne sera pas loin, et la baisse tendancielle du temps que nous consacrons au sommeil sera sans doute aussi sur le podium. Et vous quel est votre pronostic :
et sinon vous pouvez toujours :
Flagrant 😂 : la Comédie Française reprend Desproges
La Comédie Française dans le cadre de son programme “Théâtre à Table” a convié les comédiens Alain Lenglet et Christian Gonon à donner une adaptation de “Vivons heureux en attendant la mort” de Pierre Desproges.
C’est un texte résolument grinçant, et fleuri qui est une collection d’aphorismes, comme les affectionnait l’humoriste incorrect des années 1970, dont nous nous appliquerons le titre cette semaine :
Quelques burritos 🌯 pour la route :
Facebook remet en jeu son budget de 750 M$ de communication annuelle (Adage), 750 M$ tout de même…
Discord qui est dans le viseur de Microsoft pour une valeur de 10 milliards de dollars, a annoncé lancer son propre Clubhouse appelé “Stage Channels”. (The Verge). Idem de son côté pour LinkedIn qui travaille sur un clone (Techcrunch).
Altice a indiqué envisager l’introduction en bourse de sa filiale Teads pour 3 à 4 milliards d’euros (une filiale rachetée en 2017 pour près de 300 M$). (Les Echos).
fait de tenir simplement une réunion en déambulant, si possible en extérieur, remettant ainsi les péripatéticiens grecs au goût du jour.