Le Wrap Up de la semaine où la vaccination antiCovid a commencé au UK (semaine du 7 décembre 2020)
5 bullet points : médias, tech, société avec une pointe de culture
👓 Le Wrap Up de cette semaine fait 2 297 mots, soit un temps de lecture moyen de 11 minutes.
Au sommaire cette semaine :
Visé 🎯 : le duopole de la publicité digitale à nouveau mis en cause
Familier 👨👩👧👧 : tous les streamers veulent une part de la famille
Le Wrap Up de l’année 2020 🎅 : 1/3
Lu 📙 : The Right It d’Alberto SAVOIA
Vu 🎭 : L’Ecole des Femmes en ligne
A vos agendas 📆
Conférence Podcast : 2020, l’année du boom des podcasts en France ?
15% des Français sont désormais accros aux podcasts et téléchargent tous les mois 100 millions d’épisodes !
Pour creuser le sujet, j'aurais le plaisir de coanimer le mardi 15/12 un Zoominar du Groupe Médias des Anciens de l’ESCP. Nous aurons la joie de recevoir Katia Sanerot, DG de Louie Media, Joel Ronez, fondateur et président de BINGE AUDIO et de Claire Hazan à la tête des studios de Spotify pour la France et le Benelux.
Inscription gratuite ici
Visé 🎯 : le duopole de la publicité digitale à nouveau mis en cause
Photo by Possessed Photography on Unsplash
Les rapports se suivent et se ressemblent : il semble qu’après avoir crié dans le désert pendant longtemps, ceux qui s’insurgeaient, pour de bonnes ou mauvaises raisons, contre le duopole publicitaire de Google et de Facebook dans le digital se soient faits entendre par les autorités des différents pays.
Cette semaine, c’est l’Inspection des Finances et le Conseil d’Etat qui remettent conjointement, après avoir consulté l’ensemble du marché, un volumineux rapport au Ministre de la Culture et au Secrétaire d’Etat au Numérique, “pour un marché [publicitaire] à armes égales”. Le ton est donné !
En passant en détail en revue l’état du marché (I), les conditions d’un retour à un terrain de jeu équitable (level playing field) au moins réglementaire au niveau national (II), les plates-formes laissant présager des comportements anti-concurrentiels (III) et les remèdes éventuels à y apporter (IV), les trois fonctionnaires font un travail de fond, devant servir à avancer sur le terrain d’une réglementation accrue pour faire respecter une concurrence plus juste sur ce marché.
A retenir de l’introduction détaillée du rapport :
Concernant l’état du marché : l’avénement de la publicité ciblée et la progression des achats programmatiques continuent de tailler des croupières aux acteurs traditionnels de la publicité.
Captant 75% du marché français de la publicité digitale et 90% de la croissance du secteur, Google et Facebook sont en situation de duopole avec frange concurrentielle sur ce marché. Ces deux acteurs offrent à la fois la possibilité de cibler précisément une audience, d’avoir accès à un grand volume d’inventaires et d’atteindre des couvertures d’audience (reachs) importantes. Ils disposent de walled gardens (jardins clos), tels que Facebook, Instagram, Google Search ou YouTube, sur lesquels les annonceurs ne peuvent acheter des espaces sur les inventaires propriétaires qu’en passant par les régies intégrées des plateformes ou par leurs solutions d’achat-vente… [Outre le fait que les médias perçoivent seulement 6% des revenus digitaux totaux], on estime qu’entre 40% et 50% des investissements des annonceurs seulement sont effectivement perçus par les éditeurs.
Sur les premières mesures de level playing field des conditions de concurrence, il y apparaît une vraie volonté d’harmonisation :
Il apparaît qu’aligner les contraintes entre le secteur traditionnel et le digital d’une part, et entre les plateformes et éditeurs en ligne d’autre part, serait un préalable, certes insuffisant mais accessible par des mesures de niveau national, à la création d’un level playing field entre ces deux principaux supports d’achat-vente de publicité. La mission propose ainsi d’harmoniser le cadre juridique régissant la publicité sur les médias audiovisuels (linéaires ou pas) et la publicité display sur internet. En outre, la responsabilisation des plateformes au regard de l’environnement qualitatif dans lequel les contenus publicitaires apparaissent (brand safety) permettrait d’assainir leurs inventaires et donc d’éviter la monétisation de contenus de mauvaise qualité ou illégaux.
Le passage en gras est intéressant en ce qu’il rappelle qu’en théorie les régies internet sont tenues de respecter la loi Sapin I sur la transparence des prix, loi qui s’applique depuis le début des années 90 aux régies TV.
Les contraintes économiques nées du RGPD sont ici pour la première fois évoquées comme véritable frein pour les médias vivant de la publicité (même si Google et Amazon écopent cette semaine de 135 M€ d’amendes par la CNIL), et préconise de systémiser les avis croisés entre la CNIL et l’Autorité de concurrence et le futur ARCOM (CSA+ARCEP).
La mission semble aussi avoir été bien aiguillé concernant le futur ePrivacy Act de l’Union Européenne qui donnerait aux navigateurs internet le pouvoir de réglementer l’usage des cookies.
Là où ça se corse pour les plates-formes :
La mission pointe du doigt plusieurs manquements qui lui semblent préjudiciables au bon exercice de la concurrence :
l’« auto-mesure » de la performance publicitaire qui fait des plateformes à la fois des juges et des parties sur le marché ;
l’intégration verticale et les conflits d’intérêts de Google sur la chaîne programmatique, qui permettent des pratiques d’offres groupées (bundling), voire de prédation, ainsi que d’auto-référencement ;
la vente exclusive de l’inventaire propriétaire YouTube sur la DSP de Google, renforçant le pouvoir de marché de Google sur le côté demande de la chaîne programmatique.
La mission émet plusieurs préconisations audacieuses qui nous semblent aller aussi loin que le revirement de la FTC cette semaine sur la “dé-fusion Facebook/Whatsapp/Instagram”, sauf qu’on sent bien que le pouvoir de coercition n’est pas entre les mains de nos hauts fonctionnaires, ni présentement, ni vraiment dans le futur proche :
empêcher l’échange de données entre services d’une même plateforme (rappelez-vous le temps où Youtube ne savait pas que vous étiez le même internaute que sur votre boîte Gmail) ;
empêcher que les plates-formes s’érigent en régulateur fixant les goulots d’étranglement et les contrôles d’accès de la pub digitale (en forçant - tiens tiens - l’interopérabilité et la portabilité des données) ;
permettre à l’Union Européenne, au vu de la vitesse d’évolution du secteur et de la lenteur structurelle des régulations européennes, une régulation ex-ante appelée aussi Sunshine Policy (rappelez vous la note du Conseil d’Analyse Economique sur ce point) des “plates-formes structurantes” avec des mesures conservatoires ;
Cela paraît assez hallucinant pour un béotien du droit de la concurrence, mais cela reviendrait dans la foulée de l’introduction du nouvel outil de la Commission Européen, le New competition tool, “donnant à la direction générale de la concurrence (DG Comp) la possibilité de formuler des injonctions comportementales et structurelles, au vu de la seule structure du marché et sans constatation d’un abus de position dominante préalable”;
un contrôle ex-post des concentrations dans le secteur du digital avec un renversement des charges de la preuve en cas d’examen approfondi (en gros, les plates-formes devront montrer patte blanche sur les intégrations qu’elles envisagent pour leur acquisition, fini les acqui-hire où les entreprises sont démantelées et les équipes techniques intégrées sitôt l’acquisition validée).
Avant de laisser derrière ce bullet point très long, citons tout de même quelques avis divergents à la tonalité de ce rapport et de la régulation des GAFA en général, notamment celui de notre ami Julien Boyreau qui souligne que les changements tectoniques intervenus ces dernières années n’ont attendu ni la data ciblée de Facebook (et des autres acteurs), ni la programmatique pour venir tailler dans les budgets des médias traditionnels.
Le recours à l’enchère au 2nd prix, mise en évidence par William Vickrey, prix Nobel d’Economie en 1996, est d’une telle force mathématique que tant qu’elle n’est pas adoptée par les acteurs traditionnels (permises demain par la publicité TV ciblée ?) bénéficie tout particulièrement à ceux qui la pratiquent (et accessoirement à ceux qui ne supportent pas les coûts de fabrication des contenus qu’ils diffusent et monétisent).
J’ai extrait les slides du rapport ici
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Familier 👨👩👧👧 : tous les streamers veulent une part de la famille
Techcrunch constate que toutes les plates-formes de streaming vidéo se mettent à proposer une entrée familiale sur leur service :
Netflix avait ouvert le bal en proposant des profils pour les enfants (mais bannissant les contenus recommandés pour les plus 13 ou 14 ans), elle poursuit sa TV-isation (fait de consommer des contenus à plusieurs?) en proposant en test, non seulement comme sa fonctionnalité sortie pendant le Covid “Watch it Together” pour regarder à plusieurs en ligne, mais carrément de “Watch it Together” au sein du même foyer ! (De façon intéressant cette approche n’est logiquement activée que sur l’interface TV et pas sur les applis).
Au delà de l’ironie de ce mouvement, on peut ainsi dans les périodes de confinement trouver des films qui sont regardables pour TOUTE la famille, même si les limitations d’âge sont légèremenet malmenées.
A noter au passage, l’application de Fire TV d’Amazon qui non seulement propose des contenus à consommer ensemble, mais également des jeux vidéos auxquels jouer tous ensemble.
Le Wrap Up de l’année 2020 🎅 : 1/3
Pour fêter cette première année du Wrap Up, je vous propose de retrouver pour les 3 prochaines éditions, un des “meilleurs” articles longs de l’année écoulée (le plus commenté, liké ou partagé), nous voici donc dans le Wrap Up du 13 avril dernier avec cette recommandation qui parlait des biais cognitifs, tout particulièrement dans le cadre du Covid, mais le Webinar d’Olivier Sibony était hyper intéressant.
La phrase à retenir :
“Les plans sont inutiles, mais la planification est indispensable”.
Biaisé :
Remarque webinar d'Olivier SIBONY d'HEC sur le décryptage de nos biais cognitifs (théorisé magistralement par Daniel Kahneman dans Système 1 / Système 2 en anglais : thinking fast and slow) de toutes sortes dans la crise sanitaire actuelle. Des biais de modèle mental, de croissance exponentielle, de endogroupe/exogroupe, ...
Lu 📙 : The Right It d’Alberto SAVOIA
Au départ, on craint un énième livre de management / développement de start-ups qui nous explique à quel point toutes les réussites actuelles sont le fruit de stratégie évidente élaborée par des génies et qu’en fin de compte, les succès d’Apple, Facebook, Google … étaient tous évidents.
Et très vite, on est agréablement surpris : le livre rappelle que toutes les nouvelles idées de business sont des échecs en devenir, que plus de 90% d’entre elles s’apprêtent à être un ratage total.
Pour ne pas emprunter ce chemin assuré vers l’échec, Alberto SAVOIA passé par Google et enseignant à l’université de Stanford, propose une méthologie extrêmement terre à terre et pragmatique, dans la lignée d’ouvrages comme Lean Startup. Il développe page après page, un process frappé au coin du bon sens, qui propose de réduire l’incertitude de vos prochaines idées brillantes en les testant très rapidement, en dépassant le simple sondage d’opinions (qui ne vaut rien tant que les intervenants se mouillent pas), en se construisant vos propres données (Your Own DAta - YODA).
Alberto SAVOIA utilise un langage très imagé que l’on retient bien, très approprié à chaque étape. Pour ceux qui s’intéressent à la littérature qui tourne autour de l’innovation, il est même l’inventeur du terme “pretotyping” (un prototype qui fait semblant - to pretend en anglais), qui permet de valider ses hypothèses à moindres coûts, pour itérer rapidement sur l’idée initiale.
A la fin, on est emporté par la démonstration et “The Right It” est un must pour tout entrepreneur en devenir qui ne doit pas rester en chambre à continuer à caresser “l’idée du siècle” du bout des doigts, mais qui doit rapidement la concrétiser, même pour de faux, à travers différentes boucles d’itération.
Vu 🎭 : L’Ecole des Femmes en ligne
Au début je dois avouer que c’est un peu curieux, le théâtre à la maison je pensais que c’était pour les spectateurs, pas nécessairement pour les comédiens.
Passée cette boutade facile, on doit reconnaître le talent unique des comédiens de la Comédie Française servi par de grands textes.
Cette semaine, c’est l’Ecole des Femmes qui a été donné en direct samedi soir et passées les premières minutes, on s’habitue aux deux tables posées à la va-vite, aux comédiens se baladant les textes à la main, puis la magie opère : Thierry Hancisse en Arnolphe, Jérôme Pouly dans le rôle du domestique Alain, Guillaume Gallienne en Chrysalde, le vieil ami d’Arnolphe, Stéphane Varupenne dans le jeune impétrant Horace et l’ingénue Adeline d'Hermy dans le rôle d’Agnès.
Un régal !
Bonus pour les fêtes 🎄 :
Phygitalisation du travail : à l’avenir sur Zoom, vous pourrez même sentir le café des collègues et leur serrer la main.
Black Friday pavillon noir : montant en baisse pour le Black Friday cette année avec aux US : 312$ dépensé le weekend -14% vs 2019 (au même niveau que 2018).
Follow-Wrap-Up sur “l’écosystème AirPods” : sortie du nouvel AirPods Max (un casque Beats pour faire vite à 549$ / 629€ !!), pas pliable, compatible avec l’écosystème iOs.
La dés-Occidentalisation du Capitalisme est-elle en marche ? un passionnant article dans le Point avec la perspective de l’après Covid
C’est fini pour le Wrap Up de cette semaine: c’était comment ?
😕 🙂 🤩
sans plus pas mal bien
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