Le Wrap Up de la semaine où on a dépassé les 200 000 contaminations jour du Covid (semaine du 27 décembre 2021)
5 bullet points sur les médias, la tech avec une pointe de culture à la fin
Avant toutes choses et pour ce premier Wrap Up de l’année, je voulais vous adresser mes meilleurs vœux pour 2022 à vous ainsi qu’à vos proches. Vous êtes près de 523 abonnés à ma prose hebdomadaire qui s’efforce de suivre les évolutions du monde des médias, de la tech, de ce qu’on commence à appeler le Web3 et leurs impacts sur nos sociétés. Merci de vos commentaires, de vos encouragements. L’heure des commencements est aussi l’heure des bilans, en voici un petit inspiré de celui de Laura Boukobza : le bilan du Wrap Up 2021.
Sans plus attendre, le sommaire de la semaine :
Addict 🎮 : le trouble du jeu vidéo reconnu par l’OMS
Opportuniste ⭐️ : devenez producteur audiovisuel
Consensuel 👾 : comment Discord est devenu la plateforme de référence de la nouvelle génération ?
Vidéo-isé 📹 : Instagram en 2022
Animée 📽 : exposition sur l’apparition du cinématographe au Musée d’Orsay
Addict 🎮 : le trouble du jeu vidéo reconnu par l’OMS
Dans le débat permanent autour de la place des jeux vidéos dans l’éducation des jeunes générations, une nouvelle étape vient d’être franchie : L’OMS reconnaît à partir du 1er janvier de cette année, le '“trouble du jeu vidéo” comme une addiction.
Are games really addictive? Psychologists are split. The case for the defence is that this is just another moral panic. Killjoys of yore issued similarly dire warnings about television, rock’n’roll, jazz, comic books, novels and even crossword puzzles. As the newest form of mass media, gaming is merely enduring its own time in the stocks before it eventually ceases to be controversial. Furthermore, defenders argue, the criteria used to diagnose gaming addiction are too loose. Obsessive gaming, they suggest, is as likely to be a symptom (of depression, say) as a disorder in its own right.
The Economist ne tranche pas pour autant la question du bien-fondé de ces considérations médicales, mais constate que de toutes parts, les inquiétudes progressent (aussi vite que la durée passée sur les jeux en ligne en particulier ou que l’ouverture des départements dans les cliniques pour traiter cette addiction) et apporte un peu d’eau au moulin de ceux qui considéreront dans quelques années, le jeu vidéo au même titre que le tabac ou les jeux d’argent.
Le tournant a véritablement été, pour The Economist, dans l’émergence des jeux en ligne et avec lui du nouveau business model qui est passé du prix de vente unitaire d’un jeu vers un modèle de free-to-play où le principe repose sur la gratuité pour tous et sur un petit nombre de joueurs qui dépensent beaucoup d’argent (les fameuses “whales”) pour continuer à progresser dans le jeu, jeu qui ne connaît pas vraiment de fin car l’intérêt est de faire jouer ces joueurs « engagés » le plus longtemps possible.
Smartphones and modern consoles use their permanent internet connections to funnel gameplay data back to developers. That allows products to be constantly fine-tuned and tweaked to boost spending.
Le corollaire de cette recherche de maximisation du temps de jeu a pour effet, à l’appui des données de jeu qui remontent en temps réel, d’essayer de maximiser l’engagement des joueurs et de jouer sur la corde sensible de la « dépendance »…
The Economist, toujours plutôt du côté de l’autorégulation, met en avant un argument assez convaincant pour y voir plus clair : que les plates-formes de jeux acceptent de communiquer leurs données de joueurs à un tiers indépendant qui pourra, à son tour, donner une vision juste de la réalité desdites addictions.
A trop se réfugier derrière le paravent de la confidentialité de leurs données propriétaires, les éditeurs de jeux en ligne risquent le retour de bâton d’autorités étatiques qui pourraient être tentées d’utiliser la matière forte, comme le fait la Chine avec l’interdiction du jeu en semaine et limité à quelques heures seulement le week-end pour les plus jeunes.
Opportuniste ⭐️ : devenez producteur audiovisuel
Un entrefilet du Journal du Dimanche, révelait que les 8 principales plates-formes de streaming vidéo1 allaient dépenser dans le monde, 102 milliards de dollars en 2022 pour produire des nouveaux contenus (pas sûr que ce chiffre ne concerne pas aussi les achats de droits de diffusion des anciennes séries Friends et autres films de catalogue).
Ce montant serait en augmentation de 20-30% vs. 2021, pour répondre :
1) à une demande accrue boostée par la pandémie et le confinement lié ;
2) à un besoin croissant de différenciation entre elles.
Rappelons qu’aucune plateforme, à part Netflix l’an prochain, ne prévoit d’atteindre la rentabilité à court terme, ce qui pourrait être bien normal dans un marché en pleine expansion (au détriment des autres canaux de diffusion habituels comme la TV gratuite ou le cinéma), mais phénomène qui pourrait aussi s’expliquer notamment pour Amazon et Apple, par un modèle économique qui ne passe pas par la rentabilité sur cette activité, les profits étant générés dans d’autres divisions de ces groupes.
Consensuel 👾 : comment Discord est devenu la plateforme de référence de la nouvelle génération?
Un joli papier dans le New York Times sur la naissance du phénomène Discord, comment un studio de jeux vidéos a tué dans l’oeuf tous ses projets pour lancer en désespoir de cause, un module de chat entre gamers sous le nom de Discord.
Depuis, et surtout la pandémie, la plateforme s’est ouverte au grand public adolescent:
The platform has more than 150 million active users each month — up from 56 million in 2019 — with nearly 80 percent logging in from outside North America. It has expanded from gamers to music aficionados, students and cryptocurrency enthusiasts.
En septembre, la plateforme levait 500 M$ sur une base de valorisation de 14 Md$ (selon Pitchbook). A noter que la plateforme à la différence des autres réseaux sociaux, ne propose pas de publicité (certains argueront que les spams reçut s’y apparente, mais ils ne sont pas le fait de Discord…). Ses revenus proviennent de l’abonnement à des fonctionnalités supplémentaires comme les émojis personnalisés pour 5 ou 10 dollars par mois. Depuis décembre, la plateforme permet de rendre l’accès à certains serveurs (lire forums) payants, dont le prix peut aller jusqu’à 100$ par mois, dont la plateforme prend une commission de 10%.
La plateforme a affiché 130 M$ de revenus en 2020. (Des discussions auraient eu lieu avec Microsoft sur une base de valorisation de 10 milliards de dollars, mais n’auraient pas abouti).
Avec le succès évidemment sont venus se greffer les problèmes rencontrés par toutes les autres plates-formes : la régulation des propos tenus, la prévention contre le cyberharcèlement ou la protection des mineurs (15% des 650 salariés travaillent sur ces sujets). Les serveurs les plus importants sont ceux dédiés à Minecraft ou aux dessins animés japonais qui regroupent des centaines de milliers de membres, ils sont pour la plupart chaotiques, véritables robinets à memes internet, avec moults insultes et private jokes. La régulation incombe en grande partie aux organisateurs des serveurs qui tentent de faire adhérer leurs membres à des chartes de bonne conduite dès les premières minutes de connexion.
En novembre dernier, le PDG de la plateforme, James CITRON, avait laissé entendre qu’elle regardait du côté du Web3 et des NFTs comme potentielle piste de développement.
Il est vrai que la plateforme est devenu un must-have pour tout projet de NFT qui se respecte, tant il est devenu un lieu commun que les communautés devenaient le coeur du Web3. Ces communautés disons-le, sont souvent constituées de membres davantage appâtés par la perspective d’avoir accès à des rabais sur les prochains drops de NFTs et à une plus-value rapide, que mues par la volonté de faire corps avec des personnes partageant les mêmes centres d’intérêt.
Toujours est-il que le centre de gravité de la plateforme reste résolument du côté des gamers et que la menace de départ des membres les plus influents de ces groupes de joueurs ont réussi en quelques heures, à amener le CEO à se rétracter et à indiquer que ce projet d’appairage avec les wallets des utilisateurs n’était plus à l’ordre du jour.
Ajoutons qu’il est curieux que pour un monde du Web3 qui prône la décentralisation, accorder à Discord, c’est à dire à une plateforme centralisée, le monopole des conversations, voire même de la gamification promise dans les drops des différentes collections, avait quelque chose de sacrilège. Certains projets comme celui de SPZK prennent justement le contre-pied de cette approche, en soulignant qu’il est désormais important pour les communautés d’adopter des outils aussi décentralisés que la blockchain qui les sous-tend.
Vidéo-isé 📹 : Instagram en 2022
En juillet dernier, nous avions relevé que le CEO d’Instagram Adam Mosseri ne se cachait plus de vouloir faire d’Instagram, une plateforme vidéo-first. Il réitère en fin d’année avec cette vidéo, sa priorité pour 2022 est de continuer à développer Reels par dessus toute autre forme de contenus.
La seconde priorité donnée est celle du messaging. Ce qui peut paraître fortement ironique, puisque d’un côté on met l’accent sur la forme la plus compliquée et la plus élaborée de communication avec la vidéo, et de l’autre on se concentre sur la forme la plus rudimentaire qu’est le message écrit. Sans doute tout cela n’est pas si ironique, mais montre bien cette double volonté de faire consommer toujours plus de contenus, et la vidéo est le contenu roi pour cela - accessoirement ne pas laisser Tiktok prendre trop d’avances- et faire en sorte qu’Instagram continue d’être l’endroit où chacun peut retrouver mes amis et interagir avec eux.
Enfin sont également cités la transparence (pour répondre en partie aux critiques virulentes sur la toxicité - connue par Facebook- des vidéos sur son public adolescent) et de nouveaux outils de monétisation pour les “créateurs”.
Animée 📽 : exposition sur l’apparition du cinématographe au Musée d’Orsay
Une exposition passionnante (et qui finit bientôt : le 11 janvier) au Musée d’Orsay qui retrace l’émergence du cinéma avant de devenir l’art populaire majeur au XXème siècle.
L’exposition s’attache à montrer l’obsession du XIXème siècle à donner l’impression de mouvement aux images, exposition déclinée autour de quatre grandes thématiques :
la mutation de la ville avec son corollaire du mouvement de la foule;
les mouvements complexes de la nature qui va pouvoir être ainsi décrite, ralentie, décomposée ;
Le corps humain et la magie de ses mouvements harmonieux que ce soit la course, la danse ou la pantomime ;
enfin, le cinéma comme élément destiné à instruire les foules sur l’histoire et quelques grandes reconstitutions historiques;
Au-delà des objets ressortis des archives et des films pour la plupart tirée des archives de Gaumont et de Pathé, il était capital de montrer l’impact qu’aura le cinéma sur les autres arts, et sur la peinture en particulier. Les toiles de Caillebotte, de Corot, de Seurat et de Monet bien sûr, viennent montrer comment la peinture se détache petit à petit de la représentation statique de la nature pour s’attacher à donner à voir le mouvement.
Parmi lesquels : Netflix, Disney+, Amazon Prime, HBO Max, Apple TV