Le Wrap Up de la semaine où on a tiré sur l'ancien président Trump (semaine du 8 juillet 2024)
💡: modèles éco des nouveaux médias - 🪺: TF1+ devient agrégateur - 💬: C. Guilly sur la conversation médiatique - 🌳: un chabot IA du WashPo sur le climat - 🎨: Ellesworth Kelly à la Fondation LV
Au sommaire de cette semaine :
Hébergés 🪺 : TF1+ accueille Deezer, l’Equipe et le Figaro TV
Conversé 💬 : Christophe Guilly analyse la conversation médiatique
⏳ Temps de lecture : 7 minutes 45 secondes
Réinventés 💡 : les modèles économiques des nouveaux médias
⏳ : 2 min 24 sec
La newsletter de Simon Owens regorge toujours de réflexion profonde sur la transformation du paysage médiatique. Cette semaine, il revient sur l’idée que la northstar metric1 des médias devrait dorénavant être l’engagement.
Pour de nombreux éditeurs, le but a longtemps été de maximiser l'audience à tout prix, souvent au détriment de la finesse d’analyse.
Memberful
Cependant, des alternatives émergent aujourd’hui avec des plateformes comme Memberful, permettant aux créateurs d’augmenter leurs revenus à travers des abonnements qui mettent l’accent sur leur travail fourni et renforcent les liens avec la commununauté de ces crétateurs. Sur la plateforme Memberful, l’intégration d’outils répandus comme MailChimp (newsletter) ou WordPress (blogging), tout en conservant un contrôle total sur son audience et sa marque.
Les magazines de niche et les aspirations de leurs lecteurs
Une des réussites de ce nouveau modèle est Craig Fuller, fondateur de FreightWaves (un site d’informations sur le transport routier!). Au-delà de vendre des produits de données, il rachète des magazines de niche pour ensuite proposer des produits et services directement liés à l’audience de ces magazines.
For instance, he bought Flying Magazine, an outlet geared toward people who own private planes and jets. Then he bought a large plot of land in Tennessee, built a small airport at the center of it, and began selling parcels of land to flying enthusiasts who want to build homes around this airport.
Ce faisant et en développant un aéroport au Tennessee, il crée une synergie entre média et immobilier, illustrant comment les médias peuvent réduire les coûts d'acquisition de clients pour d'autres services ou produits.
Linkedin relie annonceurs et éditeurs de newsletter
A une autre échelle, LinkedIn transforme également sa stratégie de contenu en permettant aux pages d'entreprises de sponsoriser des articles de newsletters (que la plateforme héberge également). Cela représente une évolution intéressante: en offrant de rapprocher offreurs et demandeurs il fait un pas significatif dans le marketing de contenu, se permettant même au passage de rendre impossible l'exportation des listes d'emails de prospects qui auraient répondu positivement aux pubs dans les newsletters !
Le Washington Post
Dans cet atmosphère de bouleversement, le Washington Post peut (et doit) sous la houlette de Jeff Bezos revenir challenger le New York Times, à tous les plans. Une des raisons souvent pointées du doigt est sur la sur-représentation des news politiques dans le WP par rapport au NY Times. Sans reprendre le scénario des jeux casual en ligne et des recettes de cuisine, il est indispensable d’identifier des verticales non politiques qui vont venir nourrir le WP et constituer un blue ocean.2
That’s not to say that WashPo needs to go and build out its own games and recipes verticals — though that approach probably wouldn’t hurt — but any significant expansion will require an aggressive investment in non-politics verticals. Bezos has the buying power to snipe away the best content creators across virtually any niche, but someone in the company’s executive ranks needs to take the initiative to recruit that talent.
Audible
En parallèle, Audible teste un nouveau modèle d'abonnement permettant l'accès illimité aux livres audio (précédemment les abonnés d’Audible ne faisaient qu’acheter un montant de crédits pour des audiobooks chaque mois), payant les auteurs via des redevances, une méthode déjà éprouvée, pour le pire et le meilleur, dans l'industrie musicale. Ce changement risque là-aussi d’être avantageux pour les auteurs à succès qui commettent des sagas littérraires... Simon Owens veut faire le pari que cette nouvelle forme de consommation finira par faire grossir le marché des audiobooks par abonnement.
CNN
Enfin, CNN envisage de (re)lancer son propre service d'abonnement digital, mais pour réussir, il devra très probablement diversifier ses contenus au-delà des débats politiques qui constituent actuellemenet le coeur de ses programmes.
Cette révolution des médias montre que les compagnies de demain ne se contenteront pas de suivre les anciens modèles basés sur la publicité et les abonnements, mais chercheront plutôt à créer des écosystèmes où les médias servent de levier pour d'autres activités commerciales.
Hébergés 🪺 : TF1+ accueille Deezer, l’Equipe et le Figaro TV
⏳ : 1 min 13 sec
TF1 passe la seconde sur son offensive digitale et se fait plateforme d’agrégation de contenus vidéos premium gratuits :
S'inspirant de modèles déjà existants comme MyCanal de Canal+ et les Channels d'Amazon Prime Video, cette initiative vise à établir TF1 + comme le premier agrégateur gratuit de France, diversifiant ainsi son offre par l'incorporation de médias de tiers éditeurs.
A partir de cet été, les spectateurs d'Île-de-France pourront découvrir sur la plateforme des chaînes telles que L'Equipe et celle du Figaro, ainsi que des contenus vidéo de Deezer, enrichissant significativement l'expérience utilisateur.
Rodolphe Belmer, le PDG du groupe TF1, a souligné cette progression comme un jalon crucial de leur stratégie d'accélération digitale. La stratégie d'agrégation de TF1+ vise non seulement à amplifier l'attractivité de la plateforme mais aussi à multiplier les programmes disponibles à tout moment pour les utilisateurs.
La plateforme, lancée début 2024, a déjà attiré une audience quotidienne d'environ 4 millions de streamers, avec un catalogue qui s'est étoffé de 15 000 à 20 000 heures de programmes disponibles.
L'agrégation outrepasse la simple diffusion de productions originales ou d'achats de catalogues. Elle permet à TF1 de proposer des chaînes, des flux live et des vidéos en replay d'éditeurs tiers, ce qui enrichira les entrées thématiques de la plateforme et offrira des contenus directement accessibles à côté des chaînes du groupe TF1 et d'une cinquantaine de chaînes Fast.
Les avantages financiers de cette initiative, bien que non détaillés, sont évidents :
les éditeurs tiers bénéficieront de revenus complémentaires grâce au dynamisme du marché publicitaire vidéo et à la forte audience de la plateforme.
Les accords spécifiques, comme celui avec L'Equipe, permettront à TF1 + de distribuer la première chaîne sportive de France et ses contenus en replay, renforçant ainsi sa verticale « sport ».
Le partenariat avec Deezer, quant à lui, introduira des captations live d'artistes populaires, inaugurant une nouvelle thématique « musique » sur TF1 +, promise à un enrichissement continu.
Cette évolution marque une étape significative pour TF1, qui ne se contente plus de jouer dans la cour des grands du streaming mais cherche désormais à redéfinir les règles du jeu en faveur d'un modèle plus inclusif et diversifié.
Conversée 💬 : Christophe Guilly analyse la conversation médiatique
⏳ : 1 min 53 sec
Le sociologue Christophe Guilluy tient une place contrastée dans le débat public : chroniqueur des évolutions sociales et culturelles de l'Occident, il pose un regard acéré sur le décalage croissant entre la conversation publique et les réalités du Français moyen.
Dans ce moment post-électoral, il détaille ce décalage dans L'Express.
Pour lui, la problématique est relativement simple : la conversation publique nourrie par les élites (politiques, journalistes, intellectuels) ne reflète plus vraiment les perspectives et préoccupations des citoyens ordinaires.
Guilluy fait le rappel salutaire que pour que la démocratie fonctionne, il faut une connexion culturelle entre les strates “supérieures” et “inférieures” de la société, connexion aujourd'hui largement rompue.
Cette rupture n'est pas un phénomène nouveau. Guilluy retrace son origine aux années 1980, où le découplage économique entre des métropoles marquées par une tertiarisation de l'économie provoquant un enrichissement significatif, et les autres territoires. Les élites, majoritairement confinées dans ces "villes citadelles", perdent le contact avec la base, se figurent une "vraie altérité sociale".
Dans les médias, ce décalage se manifeste par une conversation qui serait, selon Guilluy, une réplique des salons parisiens du XIXe siècle, où la bourgeoisie établissait les normes morales.
Aujourd'hui, ces normes sont érigées autour de totems modernes comme un antiracisme, un féminisme et une écologie parfois dévoyés (c’est son opinion), servant plus à affirmer une supériorité morale qu'à adresser les problèmes concrets.
Guilluy critique également la manière dont certaines voix dissonantes sont traitées dans les médias : souvent reléguées au rang d'hérétiques ou marquées d'une étiquette péjorative pour minimiser leur crédibilité (il ne fait pas trop de doutes que la période électorale que nous venons de transverser est venu nourrir son discours).
Il livre aussi un témoignage personnel sur le risque professionnel et psychologique encouru par ceux qui osent défier le “consensus idéologique dominant” :
Je remarque que, dans [les cas où je suis invité], la puissance invitante prend soin de marquer une distance. On dit : "l’essayiste controversé" ; on me pose des questions du type "vos 'thèses' sont reprises par l’extrême droite"… Oubliant de dire que la France périphérique n’est pas une "thèse", mais une photographie de la réalité et que ce concept est en fait repris par toute la classe politique, les universitaires et les sondeurs, qui parlent maintenant tous les jours d’une France des campagnes, du périurbain, des petites villes, des villes moyennes, c’est-à-dire la définition que je donne depuis vingt ans de la France périphérique.
Mais dans les débats, les signaux faibles sont suffisants pour indiquer à l’audience que "lui, pas bon, pas du sérail". De manière générale, les voix dissonantes sont dissuadées d’être trop sincères dans leur diagnostic…. Les "bad buzz", les tribunes de dénonciation, bref, les mécanismes de disqualification intimident psychologiquement, mais aussi professionnellement.
[Ces mécanismes d’intimidation limitent l’expression sincère dans la conversation publique.]
L'essayiste conclut sur une note sombre mais nécessaire : la conversation publique doit être un espace où toutes les voix, toutes les préoccupations trouvent un écho. Ignorer cette nécessité, c'est risquer de voir la société se fragmenter davantage, entraînant des conséquences démocratiques profondément préjudiciables.
Rubriqué 🌳 : le WashPo lance un chabot IA sur le climat
⏳ : 50 sec
Mardi dernier, le Washington Post a dévoilé sur son site, un chatbot propulsé par de l'intelligence artificielle, exclusivement dédié aux questions climatiques.
Baptisé Climate Answers, ce chatbot est le fruit d'une collaboration entre les équipes produit et technique du journal, en étroite association avec la rédaction spécialisée sur le climat.
Le but? Fournir des réponses précises aux interrogations des utilisateurs, s'appuyant sur l’historique des articles du Post traitant du climat.
Pour l'instant, le chatbot se limite à ce seul domaine, mais Vineet Khosla, directeur technologique du Post envisage de l'élargir à d'autres sujets à l'avenir.
L'outil incarne une approche prudente : il ne propose de réponse que si celles-ci peuvent être solidement étayées par les reportages du journal. Si ce n'est pas le cas, il préfère ne pas répondre. Une démarche visant à garantir la fiabilité de l'information fournie, essentielle aux yeux de Khosla.
Cette innovation s'inscrit dans une stratégie plus large d'expérimentation de l'IA par le Washington Post (résumé d’articles, synthétisés par des IAs, relues par des humains).
Concernant la réception de ces innovations par les plus jeunes publics, les recherches menées par l'équipe de Khosla suggèrent que les résumés d'articles pourraient favoriser un engagement accru, les jeunes lecteurs préférant souvent ces synthèses aux simples titres pour décider de lire l'article en entier.
Coloré 🎨 : Ellsworth Kelly à la fondation LV
⏳ : 1 min 02 sec
La Fondation Louis Vuitton frappe un grand coup avec l'exposition "Ellsworth Kelly. Formes et Couleurs, 1949-2015", célébrant le centenaire de la naissance d'Ellsworth Kelly, figure marquante de l'abstraction américaine du XXe siècle. Jusqu'au 9 septembre 2024, les visiteurs peuvent découvrir plus d'une centaine d'œuvres de l'artiste, allant de la peinture aux sculptures, en passant par les dessins, photographies et collages. Une collaboration fructueuse avec le Glenstone Museum de Potomac et le studio d'Ellsworth Kelly a permis de rassembler ces pièces, enrichies par des prêts d'institutions prestigieuses telles que le MoMA, la Tate et le Whitney Museum, sans oublier des collections privées.
L'oeuvre d'Ellsworth Kelly est renommée pour son indépendance vis-à-vis des mouvements artistiques établis (il se lance en pleine vague expressionisme après guerre), explorant les liens entre forme, couleur et espace.
La Fondation Louis Vuitton rend hommage à cette démarche unique en présentant des œuvres clés de différentes périodes de sa carrière. Les visiteurs peuvent admirer des toiles telles que "Tableau Vert" (1952), première incursion de l'artiste dans le monochrome après son séjour à Giverny, ou "Painting in Three Panels" (1956), qui témoigne de son dialogue avec l'architecture (Kelly a développé une obsession sur la représentation des tableaux dans l’espace, jouant très tôt avec les volumes de ses tableaux).
L’exposition explore le processus créatif de Kelly, avec une salle documentaire qui retrace en particulier son projet pour l'auditorium de la Fondation, une commande spéciale réalisée en harmonie avec l'architecture de Frank Gehry.
"Ellsworth Kelly. Formes et Couleurs" est une invitation à (re)découvrir un artiste qui a pensé les contours de l'abstraction dans une forme simple et dont l’époque a fini par trouver le chemin.
l’indicateur de référence clé
un océan bleu est un environnement préservé de concurrence, à la différence d’un océan rouge.