Le Wrap Up de la semaine où Météo France prédit une France à +4° en 2100 (semaine du 17 mars 2025)
🦻 : Spotify pèse dans la musique - : Apple+ perd 1 Md - 🪙 : l’info ne vaut rien selon Google - 📚 : l’adtech stack de Netflix - 🎭 : la Cerisaie à la Comédie Française
Pour lire la recension du rapport de Météo France dans le Monde, c’est par ici. 1
Pour le sommaire du Wrap Up c’est par là :
5/5 🦻 : Spotify représente 40% de la croissance de la musique enregistrée
Engouffré : Apple+ perd 1 milliard par an sur son service de streaming
⏳ Temps de lecture : 7 min 46 sec
Si vous préférez tester la version audio de cette newsletter, essayez le rendu de la moulinette Google NotebookLM (cette semaine en 🇺🇸), le résumé est de plus en plus vivant :
5/5 🦻 : Spotify représente 40% des revenus de la musique enregistrée
⏳ : 1 min 32 sec
En 2024, Spotify a versé 10 Md$ à l’industrie musicale — du jamais-vu pour une seule entreprise. C’est ce qu’on apprend dans le rapport annuel de Loud & Clear de Spotify à l’industrie musicale. Axios y voit la preuve qu’une société peut reconstruire une industrie créative ravagée par la digitalisation. Il ajoute que les géants du numérique (Google/YouTube, Amazon ou même Apple) n’ont jamais vraiment mis le focus sur la musique (plutôt vue comme un produit d’appel), Spotify a patiemment investi dans la découvrabilité et l’écoute sociale.
Résultat : des fonctionnalités comme Discover Weekly ou les playlists collaboratives ont élargi la surface de jeu pour les artistes, notamment les plus petits, et fait grossir le gâteau pour toute la filière.
Selon Will Page, ancien économiste en chef de Spotify et auteur de Tarzan Economics, Spotify est responsable à lui seul de plus de 40 % de la croissance des revenus des labels au cours de la dernière décennie. Un rôle de catalyseur que personne d’autre n’a endossé.
Des chiffres qui donnent le ton :
80 % des 10 Md$ versés à l’industrie en 2024 sont allés aux labels ; le reste aux artistes et auteurs-compositeurs.
En 2024, le marché global de la musique enregistrée a atteint 31,6 Md$, dont plus d’un quart vient de Spotify. Il y a 10 ans en 2014, cette part n’était que de 6 %.
Spotify aurait aussi contribué à environ 40% de la croissance totale de l'industrie musicale (incluant artistes, labels, éditeurs) sur 10 ans.
Ironie de l’histoire : en 2014, l’industrie musicale atteignait son point bas. Non pas à cause du streaming, mais parce qu’elle tardait à y voir sa planche de salut : Spotify aurait donc incarné le bon timing techno-culturel : répondre à un besoin évident des consommateurs (accès simple, immédiat et personnalisé à la musique, facilité du paiement via les abonnements) tout en créant un système de redistribution suffisamment robuste pour faire revivre l’ensemble de la chaîne (on va dire que cela était plutôt contraint!).
Morale de l’histoire : la musique n’a pas été sauvée par la nostalgie, mais par l’innovation bien pensée. Une plateforme qui comprend les artistes, les fans, et les chiffres peut faire mieux que toute campagne institutionnelle : elle peut rendre la création rentable. Spotify ne vend pas que des abonnements — il vend un futur viable à l’industrie musicale et ne pas disparaître au passage (on sait les difficultés rencontrées par la plateforme d’atteindre la rentabilité, et son combat pour que cela soit toujours le cas dans les prochaines année).
Engouffré : Apple+ perd 1 Md$ par an sur son service de streaming
⏳ : 1 min 26 sec
Depuis son lancement en 2019, Apple TV+ a englouti plus de 5 milliards de dollars pour séduire… 45 millions de spectateurs.
Le retour sur investissement ? Pas encore là. D’après The Information, la plateforme perdrait plus de 1 Md$ chaque année, sans que cela émeuve le CEO, Tim Cook. Tant que l’iPhone continue de rapporter près de 100 (cent) Md$ de profits annuels, ce gouffre financier reste un détail comptable, une danseuse.
Ce qui distingue AppleTV+ de ses concurrents ? Une bibliothèque ultra-sélective, centrée quasi exclusivement sur du contenu original. Pas de catalogue rempli de classiques ou de licences héritées : ici, tout est maison, de Ted Lasso à Severance, qui vient de détrôner le coach anglais comme programme le plus regardé de la plateforme. Ben Stiller, à la fois acteur, producteur et réalisateur de cette série dystopique, planche déjà sur la suite. Et Cook a promis qu’il continuerait à financer ces productions, malgré les pertes abyssales.
Mais pourquoi s’acharner? Parce qu’Apple peut se le permettre…
Contrairement aux studios traditionnels ou à des plateformes comme Paramount ou Disney+, qui jonglent avec les déficits et des actionnaires impatients, Apple joue une autre partition : investir à perte dans le prestige et se positionner à long terme dans la guerre du streaming, sans la pression immédiate de la rentabilité.
Face à un public de plus en plus réticent à empiler les abonnements – crise du pouvoir d’achat oblige – la tendance est aux “super bundles” : des offres groupées qui permettent d’accéder à plusieurs services pour moins cher. Apple s’inscrit dans cette logique, en apparaissant dans des packs comme StreamSaver de Comcast, aux côtés de Netflix et Peacock.
À noter que l’article de The Information relance les rumeurs d’un rachat de Disney par Apple, qui profiterait de son immense catalogue de franchises et de contenus, à l’heure où Mickey cherche un nouveau souffle.
Mais en attendant, Cupertino continue de miser gros sur une stratégie qualitative et élitiste : peu de titres, mais des séries événementielles, avec une ambition claire – exister face à Netflix, même si ça coûte un milliard par an…
Dans l’univers du streaming, peu d’acteurs peuvent se permettre de perdre autant. Mais Apple+ ne joue pas dans la même cour, Apple TV+ reste une belle vitrine.
Démonétisée 🪙 : l’info ne pèse rien selon Google
⏳ : 1 min 25 sec
C’est un petit pavé dans la mare médiatique que Google vient de lancer. Dans une étude menée discrètement entre novembre 2024 et janvier 2025, le géant californien affirme, chiffres à l’appui, que les contenus de presse ne pèsent quasiment rien dans la balance de ses revenus publicitaires.
L’expérimentation, menée dans huit pays européens (Italie, Espagne, Pologne, Pays-Bas, Belgique, Grèce, Danemark et Croatie), consistait à retirer 13 000 sites de presse de ses services (Search, Discover et Google News) pour un échantillon de 1% de ses utilisateurs. Résultat : une chute brutale de 96% à 99% des impressions et des clics sur les contenus journalistiques concernés. Un désert numérique.
Et pourtant… malgré cette quasi-disparition de la presse de ses résultats, les revenus de Google n’ont pas bougé. Sur Search, +0,02%, soit rien. Discover enregistre bien une petite baisse de 2%, mais cela ne pèse que peu dans le modèle global. Les utilisateurs, eux, sont restés là, continuant à chercher restaurants, chaussures, symptômes de grippe ou recettes de banana bread.
Le message envoyé est clair : la presse n’est pas indispensable à Google. L’étude – qualifiée de rigoureuse par la méthode employée (essai randomisé) – vient contrecarrer une idée largement répandue dans le débat sur les “droits voisins” : celle selon laquelle Google tire massivement profit du contenu des éditeurs sans les rémunérer équitablement.
Pas étonnant donc que la France ait bloqué l’expérience, via le Tribunal de commerce de Paris, saisi par le Syndicat des Éditeurs de la Presse Magazine (SEPM). Rappelons qu’en 2019, la Directive européenne sur le droit d’auteur a introduit un droit voisin censé permettre aux éditeurs d’être rémunérés pour l’utilisation de leurs contenus par les plateformes. Une avancée saluée… mais visiblement peu redoutée par Google.
Le géant de Mountain View, déjà engagé dans des accords avec 4.400 publications dans 24 pays de l’UE via son programme Extended News Previews, semble désormais vouloir reprendre la main dans les négociations. En minimisant le poids économique de la presse dans son écosystème, Google renverse les rôles : ce n’est plus lui qui dépend de la presse, mais la presse qui dépend de sa visibilité algorithmique.
Un rapport de force en pleine évolution, au moment même où les médias européens peinent à trouver des modèles économiques pérennes.
Stacké 📚 : la solution adtech de Netflix détaillée
⏳ : 1 min 36 sec
Ta-dum. Ce simple son suffit à déclencher un réflexe conditionné chez des millions de membres — pas "utilisateurs", insiste Netflix. Et demain ? Peut-être bien la même chose… mais chez les annonceurs, espère Netflix.
Lors d’une conférence organisée par AdExchanger à New York, Nicolle Pangis, nouvelle VP Advertising de Netflix, a levé le voile sur un tournant majeur : le lancement du Netflix Ads Suite (NAS), une suite publicitaire intégrée, bâtie sur une technologie propriétaire. Objectif : offrir aux marques une expérience publicitaire aussi soignée, ciblée et fluide que celle des séries à succès.
Un SSP (Magnite), un ad server interne, des intégrations avec DV360, The Trade Desk et Xandr : Netflix se dote des outils pour jouer dans la cour des grands… tout en refusant l’étiquette de walled garden à la YouTube. Oui, la donnée circule — mais avec retenue. L’obsession reste la même : protéger l’expérience des utilisateurs.
La promesse ? Une publicité plus efficace avec 4 minutes d’annonces par heure maximum (bien en dessous des standards du marché), mais un engagement qui reste constant, même après trois heures de visionnage. “L’attention ne baisse pas, y compris pendant les pubs”, martèle Pangis. Une prouesse qu’il faudra tenir dans le temps.
Le grand atout que met en avant Netflix c’est sa connaissance intime des goûts de chacun : aucun membre ne reçoit les mêmes recommandations. Cette taxonomie ultra-fine — que Pangis qualifie de formidable — devient désormais activable pour les annonceurs. Traduction : une publicité qui colle à vos séries préférées comme un générique bien calé.
Côté formats, tout reste à inventer. Les pause ads (pubs diffusées quand on met en pause) existent, mais Netflix veut aller plus loin. Sa techno maison est conçue pour permettre une créativité que les standards programmatiques brident trop souvent.
Et face à Amazon, qui aurait opté pour l’échelle avant la finesse, Netflix joue la carte de la cohérence : “Nous avançons avec une intention claire, en gardant l’expérience membre au cœur de tout.” Traduction : pas de course au volume, mais une montée en puissance calibrée, alignée avec les attentes des agences à la recherche de partenaires stratégiques.
NAS doit être lancé le 1er avril. Pour l’instant, on ne sait pas encore tout ce qu’il y aura sous le capot. Remarquons au passage que ça n’est pas la première fois que Netflix promet de réinventer la publicité. Le nouveau discours ne répond pas à la question que se poserait toute agence média : le volume reste assez faible par rapport aux ambitions de la plateforme.
Vue 🎭 : la Cerisaie à la Comédie Française
⏳ : 1 min 9 sec
La Cerisaie, c’est toute la nostalgie russe condensé dans une pièce avec l’inaltérable ravage de l’arrivée du monde moderne.
Sur la scène de la Comédie Française, dans une mise en scène de Clément Hervieu-Léger qui date 2021, le dernier chef-d’œuvre d’Anton Tchekhov (1904) résonne avec une acuité troublante : les transitions ratées, l’abandon de la grandeur passée, les renoncements nécessaires aux privilèges.
De retour de Paris, Lioubov Ranevskaïa, propriétaire terrienne fantasque, retrouve sa demeure d’enfance, menacée par la vente. Entourée de sa famille et de ses souvenirs, elle refuse de voir l’évidence : la cerisaie – ce jardin d’Éden – doit être vendue aux enchères.
Lopakhine, fils d’un ancien moujik devenu nouveau riche, leur propose un plan de sauvetage : couper les arbres pour en faire des lotissements pour estivants. Il sera en dernier l’acheteur, symbolisant le basculement vers un monde nouveau.
La beauté de la pièce tient dans sa tension : entre nostalgie et renouveau, immobilisme et urgence, avec de joyeuses danses de désespoir.
Chaque personnage incarne une facette de cette société russe au tournant du XXe siècle avec laquelle on se sent un moment en sympathie : il y a Trofimov, l’éternel étudiant révolutionnaire qui annonce les temps nouveaux, Varia, la fille adoptive sérieuse, Firs, le vieux serviteur resté ancré dans l’ancien monde... Et au centre, une cerisaie – luxuriante, inutile, irrémédiablement vouée à disparaître (qui ne sera jamais qu’esquissé à travers un tableau qui la représente).
Hervieu-Léger met en abime les souvenirs d’enfance de tous, des acteurs mais aussi des spectateurs.
La troupe de la Comédie-Française joue avec une sensibilité contenue, un naturel bouleversant qui laisse filtrer la langue claire de Tchekhov et la mélancolie diffuse d’une époque révolue.
Ce n’est pas qu’une histoire russe : c’est celle de toutes les transitions qu’on n’a pas su voir venir.
Ainsi, des records de chaleur jusqu’à 50 °C sont possibles localement dès l’horizon 2050 et deviennent « probables » lors des canicules en 2100.
Le nombre de « nuits tropicales », caractérisées par une température minimale supérieure à 20 °C, va augmenter progressivement : le pays en connaîtra douze en moyenne à + 2,7 °C et vingt-quatre à + 4 °C, contre deux en 1976-2005.