Le Wrap Up de la semaine où Le Pen - Macron refont le match de 2017 (semaine du 11 avril 2022)
5 bullet points : médias, tech, NFTs avec une pointe de culture à la fin
Au sommaire cette semaine :
Mithridatisés 🧪 : Netflix traque ses resquilleurs avec délicatesse
Banditmanchoté 🎰 : le modèle de Tiktok se répand sur le net
Démystifiés 🧙♂️ : les NFTs à la baisse ?
Twitté 🐦 : Elon Musk voudrait défendre la liberté d’expression
Dispensable 📸 : Virgil Abloh curateur post mortem à la Fondation Louis Vuitton
Mithridatisés 🧪 : Netflix traque ses resquilleurs avec délicatesse
Le sujet est entendu : Netflix veut fermer les vannes du partage de codes entre abonnés et passagers clandestins, source de perte de revenus pour la firme au N Rouge. Cependant, le dernier trimestre a déçu les marchés qui attendaient une croissance plus importante du nombre d’abonnés (le retrait de Netflix de Russie à la suite de la guerre en Ukraine n’est pas venu aidé).
Analysts expect revenue growth to average 12% annually over the next four years compared with a projected 8% annual average for subscriber growth, according to FactSet estimates.
Une partie de l’atteinte de ces objectifs tient à la capacité du service à convertir une partie de ses utilisateurs non payants en abonnés fidèles et il y a un vrai risque culturel à prendre de front ce sujet tant la pratique du partage de codes est installée :
“Password sharing is something you have to learn to live with because there’s so much legitimate password sharing, like you sharing with your spouse, with your kids,” disait en 2016 Reed Hastings.
Une étude de février dernier indiquait que 42% des répondants partageaient leurs codes (bien que pour la plupart ce soit avec les membres d’un même foyer). Pourtant, d’après eMarketer, 611 milions de personnes ont regardé les programmes Netflix l’an dernier, ce qui est près de 3 fois le nombre total d’abonnés actuels.
Le partage de codes serait à titre principal le fait de la cohorte des 18-29 ans, à savoir plutôt des étudiants en passe d’entrer dans la vie active et à même de se sédentariser et de s’abonner pour de bon à leur service vidéo préféré, de la nécessité de leur demander gentiment cette pratique. Pour rappel trois pays d’Amérique Latine testent une prime de 3$ par mois pour obtenir 4 codes supplémentaires à partager dans le foyer et au-delà.
Banditmanchoté 🎰 : le modèle de Tiktok se répand sur le net
Un article relevé par Julien Boyreau pour notre petite publication dans The Information.
La journaliste l’appelle le “bandit manchot parfait”, mais nous autres l’appelons juste l’algorithme de Tiktok. L’article évoque la multiplication des apps et services qui s’inspirent du succès de tiktok, comme à une époque tout le monde a su répliquer la timeline de Facebook.
On ne compte plus les concurrents directs (et indirects) qui ont voulu capter le modjo de l’application chinoise :Instagram, YouTube, Spotify, Snap ou Reddit lui ont toutes pris des features.
Mais des nouvelles apps vont plus loin et se sont carrément construites sur le même modèle : Playhouse (immobilier), Snack et Feels (dating), Supergreat (beauté), Flip (bien-être), et même un “TikTok de la Crypto” appelé Bullz. Aussi : ShopShops (live shopping), The Lobby (qui y ajoute la dimension téléachat) et même Instaread se décrit comme “Instagram stories x Tinder x TikTok, mais pour les livres…”
Cet archétype tient l’on s’en tient aux caractéristiques principales à :
le scroll vertical alimenté par un algorithme qui vous diffuse surtout des vidéos auxquels vous n’êtes pas abonnés;
“TikTok,” said Julie Albright, a digital sociologist at the University of Southern California, “is exactly like gambling on a Las Vegas slot machine, where sometimes you win, sometimes you don’t. But you keep pulling that arm or pushing that button, hoping the next round you’ll win and it gives you that dopamine hit when you do [get] a jackpot.”
Ce scroll vertical est aussi bien plus adapté à la morphologie de l’utilisateur sur le téléphone, par opposition par exemple au swipe droite ou gauche des apps de dating qui requiert presque de s’y prendre à deux mains, le mouvement du pouce est ici minimal;
la brièveté des formats vidéos (15-40 sec);
Toutes les routines d’automatisation d’édition des vidéos : beaucoup d’entre elles au delà des filtres d’effets vidéos standardisés (choses qu’Instagram avait déjà popularisé sur les photos) il y a l’utilisation d’un fond vert qui permet de reproduire l’environnement en toile de fond;
Certaines de ses recettes semblent déjà porter leurs fruits comme pour l’application de dating Feels dont la durée moyenne de consommation quotidienne est de 45 minutes, au-dessus des standards de marché…
Cependant, avec les aspects les plus addictifs de l’app vient aussi le ressentiment que les utilisateurs peuvent ressentir à l’égar des dark patterns nourris de la pseudo science du neuro-marketing.
TikTok’s UX leverages all of these components—the scrolling, editing, layout and video—to keep users swiping up. “We’re trading sleep for entertainment, we’re trading health for entertainment because we’ve been captured by these small devices and these apps that are leveraging our psychological propensities in ways that are like glue,” said Albright.
Adds Messina, “This TikTok-ization of feeds [is] like information waterboarding. Except that you choose to do it.”
Démystifiés 🧙♂️ : les NFTs à la baisse ?
En pleine Paris Blockchain Week, Les Echos ont décidé de venir troubler la fête à la blockchain et d’apporter de l’eau au moulin des sceptiques de la révolution Web3 avec un article titré “Les NFT font des déçus, les ventes décrochent.”
Reprenant les chiffres du site NonFungible.com, les transactions auraient reculé de 6 % comparées au trimestre précédent, à 7,8 milliards de dollars, contre 8,3 milliards en décembre (excusez du peu). Moins qu’une correction, les différents analystes du secteur s’accordent sur une stabilisation de ce marché encore tout neuf.
Le volume total de transactions a chuté de 47% sur trois mois, à 7,44 millions en mars. Le nombre de portefeuilles de NFT, lui aussi, a sévèrement décroché : de 25,4 % sur le trimestre observé, à un peu moins de 1,5 million. Ces indicateurs sont, toutefois, à des années-lumière de ce qu’était le marché des NFT il y à peine un an, lorsqu’il ne comptait que 93.000 « wallets », 470.000 transactions et qu’il pesait 790 millions de dollars.
Un constat partagé par les fonds d’investissement en NFT qui estiment que les investissements se concentrent à présent sur la qualité, comme le marché des ICO qui avait flambé en 2016 : “99 % des projets ne proposent rien, dans les NFT, 1 % perceront et feront le marché.”
Twitté 🐦 : Elon Musk voudrait défendre la liberté d’expression
Une partie du réseau Twitter est devenue en quelques années un nid infesté de crypto-investisseurs et apprentis influenceurs du Web3, au point de prendre l’appellation de NFT Twitter.
Ces tweets viennent peupler votre timeline dès que vous manifestez un intérêt pour ce secteur. Par la suite, par le jeu des bulles de filtre, vous vous retrouvez dans un monde parallèle où il n'est plus question que de DeFi1, WL2 et autres WAGMI3.
Naturellement, il était logique, comme dans chaque révolution tech suscitant une fièvre spéculative, que des personnes mal intentionnées et autres scammers patentés, sans évoquer les bots, viennent user et abuser des possibilités de viralité du réseau qui gazouille.
🚀 Puis vint Elon Musk :
L'homme le plus riche de la planète (fortune estimée à 300 Md$), ému par la dérive funeste du réseau, tant sur l'aspect des arnaques aux shitcoins que par les atteintes à la liberté d'expression, se porta opportunément au chevet du réseau social.
Dans une charge éclair, il devint en quelques jours le 1er actionnaire, puis aussi rapidement, se vit proposer de rejoindre le Board en s'engageant à ne pas dépasser les 14,9% de détention pour deux ans.
Par un coup de théâtre (annoncé évidemment par un tweet), le turbulant milliardaire fit savoir qu'il ne souhaitait plus rentrer au Conseil d'Administration, mais tout simplement lancer une Offre Publique de Retrait (valorisée à 43 Md$), pour entreprendre les modifications de fond permettant au service de survivre et de refaire vivre la démocratie.
CZ, le non moins remuant patron de Binance, une plateforme d'échanges de cryptomonnaies (et bien plus), a, à cette annonce, encouragé, par un tweet, Musk à faire définitivement basculer le réseau dans le Web3 pour en faire un accès grand public à la blockchain :
En somme : retire-le de la bourse, profite de la plateforme pour populariser une cryptomonnaie liée à l'utilité du réseau, décentralise ce réseau sur la blockchain (en particulier pour ne plus avoir à subir les velléités interventionnistes de gouvernement sur une organisation centralisée donc vulnérable), facture les comptes certifiés pour ne plus subir la prolifération des bots qui viennent polluer la conversation publique, sans parler de ceux qui propagent les fake news à dessein.
Vaste programme !
Scott Galloway dans son podcast Pivot dénonce les nobles intentions de Musk, en soulignant que c’est une façon pour lui de se débiner de son premier achat et qu’il n’a pas vraiment les moyens de son offre (cela reviendrait pour lui à gager une partie très significative de ses actions Tesla, d’autant plus que le cours de Tesla a aussi connu de forts épisodes de volatilité. Les prêteurs, échaudés par cette volatilité, exigeraient des garanties significativement supplémentaires à l’offre de 54 Md$).
Dispensable 📸 : Virgil Abloh curateur post mortem à la Fondation LV
En juin 2019, Virgil Abloh, fondateur du label Off-White et directeur artistique des collections homme de Louis Vuitton, signait Coming of Age, une première exposition à la galerie Little Big Man à Los Angeles, au sein de laquelle il invitait quelques-uns de ses amis artistes et créatifs à se réunir autour d’un de ses thèmes favoris : l’enfance – qu’il abordera ensuite lui-même au sein de ses défilés automne-hiver 2022-2023 et printemps-été 2022 pour Louis Vuitton.
Aux côtés des photographes Ari Marcopoulos, Inez et Vinoodh ou Nobuyoshi Araki, le skateur Lucien Clarke et le jeune artiste pluriscipliaire Julian Klincewicz exploraient ainsi avec leur propre sensibilité le passage de l’enfance à l’âge adulte, à travers le prisme des classes, des origines, de l’économie sociale, des cultures alternatives, de l’isolement et de la camaraderie.
Voilà la plus longue explication de l’exposition (gratuite) actuellement visible à la Fondation LV. Sur place, peu d’explications supplémentaires et une série de clichés disparates exposés dans les halls de la Fondation. Cette exposition se veut un hommage posthume à son désormais illustre curateur,mort prématurément il y a quelques mois.
La légitimation des contre-cultures par les maisons de haute couture est un phénomène aussi ancien que John Galliano chez Dior, mais elle crée toujours le même malaise, quand le Luxe reprend les codes des contre-cultures, on saisit aisément le caractère factice plutôt qu’inclusif de ce mouvement.
Même s’il est indéniable que ce genre de récupération donne à la marque autrement plus de visibilité sur l’ensemble de la société que l’entre-soi collet monté un peu poussierreux qui prévalait précédemment, l’arrière-goût reste désagréable et fait peut-être mieux comprendre la notion, pourtant réfutée, “d’appropriation culturelle”.
Est-ce qu’une contre-culture exposée ainsi dans une fondation d’Art Contemporain à l’effigie d’une marque de luxe, ne perd pas cet attribut et perd un peu de son âme à frayer avec la Culture ?
Que chacun se fasse son idée :
Decentralized Finance : Finance décentralisée
Whitelist : qui permet d’accéder à la vente d’une collection de NFTs avant la vente publique
WAGMI : we’re all going to make it, crie de ralliement des NFT-enthousiastes à l’idée que le marché montera éternellement et récompensera les early adopters.