Le Wrap Up de la semaine où Dear Henry a dit farewell (semaine du 27 novembre 2023)
🎁 : Apple + Paramount - 🎤 : nouvelle édition du Comptoir IA - 🏔️ : Canal s’implante en Scandinavie -🧑🦯 : ce que l’algorithme de Spotify ne voit pas - ☀️ : Sorolla, maître de la lumière
Au sommaire de cette semaine :
⌛️ Temps de lecture : 7 min 43 sec
Empaquetés 🎁 : Apple et Paramount unissent leurs forces
⌛️ : 1 min 21 sec
C’est parce que Noël approche que sans doute Apple et Paramount envisagent de regrouper leurs services de streaming à un tarif réduit (aux Etats-Unis). Cette stratégie est sans surprise, une réponse à la concurrence croissante dans le streaming vidéo, où chaque géant du divertissement cherche à rendre son offre plus séduisante et abordable.
Selon les données d'Antenna mentionnées dans l’article, Apple TV+ et Paramount+ ont un positionnement pointu et connaissent tous les deux, les taux de désabonnement les plus élevés (churn rate) parmi les services de streaming premium, avec HBO Max.
En réponse à cette volatilité, ces deux services envisagent une alliance. Cette simple combinaison de services de télévision (qu’on a vu en France avec l’accord englobant Apple TV+ dans le service de Canal+ pour une année) n'est cependant pas une solution durable à la crise existentielle que représente le taux de désabonnement structurellement élevé dans l'industrie du streaming (particulièrement pour les catalogues un peu moins disant comme Apple et dans une moindre mesure par Paramount. L’attrait pour la nouveauté est l’un des facteurs principaux du manque de rétention, les abonnés venant s’inscrire et payer de plus en plus de façon opportuniste, pour juste consommer une série).
L'avenir '(et historiquement le succès) des offres groupées (les bundles en bon franglais) ne réside pas, selon l’auteur de l’article, dans l'accumulation d’un même type de service dans un même canal de distribution, mais plutôt dans la création “d’affinités de style” intégrant différents services comme la téléphonie, le haut débit ou la télévision. Si l’on s’en réfère au succès d'Amazon Prime, un service tiré par un type de services mais dont le churn s’est significativement réduit en y ajoutant des services plutôt moyens mais assez good enough pour en faire un puissant instrument de rétention.
Par ailleurs, on a aussi vu passer le mois dernier l'initiative de Netflix de s'associer avec Verizon et Warner Bros-Discovery pour créer un bundle que l’auteur considère dans l’épure de ce qu’il faut faire. Dans la même veine, Apple avait ajouté Apple News, Apple Arcade et Apple Music dans son offre groupée (Apple One).
Pour conclure, comme les démarches de cobranding, il faut chercher des partenariats qui complètent et ajoutent une nouvelle dimension à l’offre, plutôt que simplement ajouter plus de contenus pour moins cher.
Bref 🎤 : une nouvelle édition réussie du Comptoir IA
⌛️ : 1 min 56 sec
Il y avait le premier samedi du mois, il y a désormais le dernier mercredi du mois : c'est la date choisie pour la tenue du Comptoir IA mensuel, le meilleur rendez-vous parisien des curieux de l'IA.
Toujours organisé par Nicolas Guyon et son orchestre, le meet-up permet d’effectuer un tour assez complet de l’horizon des innovations dans l’IA. La fréquence mensuelle a du mal à résister au rythme des annonces du secteur.
Voici les principaux temps forts de la soirée :
1️⃣ Les News par Nicolas :
🍿 La Saga OpenAI : retour sur la chronologie des changements de management des derniers jours au sein d'OpenAI et les conséquences de cet épisode sur l'évolution du LLM après cette crise de croissance.
🇫🇷 France strikes back ? le lancement salué de Kyutai (sphère en japonais) soutenu par Xavier Niel, Rodolphe Saadé et l’ex CEO de Google, Eric Schmidt.
🏪 Lancement des GPTs (à la suite du Dev Day d'OpenAI) pour automatiser les prompts ChatGPT
📹 L'ère de l'IA vidéo : accélération des acteurs sur ce segment, un cran au dessus en termes de complexité. Démonstration avec la vidéo de Pika Labs :
2️⃣ Usecase de ChatGPT Vision : ⚽️
Tristan Lécuyer a présenté un beau cas d'utilisation de ChatGPT Vision : fondateur de The IFC, il rassemble des joueurs amateurs du jeu vidéo FIFA et l'IA (et son API) lui permet déjà d'extraire à la volée les scores et stats des rencontres.
Un cran plus loin : l'IA a commencé à les aider à faire du matching de joueurs de niveau équivalent (à partir de leurs statistiques passées) et elle peut aussi coacher les joueurs sur la composition optimale de leurs équipes à partir des joueurs disponibles.
3️⃣ Créativité et IA : 🎨
Charlotte Cohen a montré comment elle a créé au sein de son agence Braand Studio, une vidéo entièrement en IA générative en combinant 12 différentes IA animant son logo d'agence Z-Monster (qui est aussi une collection de NFTs).
4️⃣ Média et IA : 📓
Rémi Rostan a lancé un magazine papier gratuit généré à "99% par l'IA" pour les visuels et le texte. Le résultat de LHC (Les Heures Claires) est bluffant et tout à fait lisible, un produit très qualitatif grâce à MidJourney.
Les éditeurs de presse peuvent commencer à trembler (les Echos ont déjà repérés cette initiative).
Petit appel public : Rémi recherche des sponsors pour ses prochaines éditions et potentiellement des professionnels de l’édition pour l’aider à professionnaliser son approche.
5️⃣ Docu historique 🎞️
Alexandre Lavallee a monté avec quelques prompts le squelette d'un docu sur Jean Moulin. Il a aussi fait la démo de son prochain produit "Short Maker History" qui avec un sujet et quelques lignes de contexte propose un scénario avec moodboard d'à peu près n'importe quoi.
6️⃣ Documentation et Code : 😑
Argil continue de tester en permanence de nouvelles façons d’utiliser et surtout de combiner des IAs entre elles, afin d’identifier de nouveaux cas d'usage : ce mois-ci Laodis Menard a montré comment il a simplifié à l'aide de ChatGPT Vision, le pensum ultime des développeurs : la documentation du code !
Les screenshots et la description sont générés en quelques minutes ...
Septentrional 🏔️ : Canal s’implante durablement en Scandinavie
⌛️ : 1 min 33 sec
Les Echos ont détaillé la semaine dernière la situation critique de Viaplay, l’opérateur de streaming suédois autrefois porté aux nues comme la preuve vivante qu’un acteur local pouvait s’en sortir face à la concurrence américaine : il est à présent confronté à une chute brutale de sa valeur en bourse reflet de ses difficultés financières. Canal+, devenu récemment le principal actionnaire de Viaplay (prise de participation de 12%) a décidé de participer activement à la restructuration de l'entreprise en difficulté.
Viaplay, confronté à des défis financiers, annonce une restructuration comprenant une injection de capital de 4 milliards de couronnes suédoises (environ 350 M€).
En outre, la société va déprécier 2 milliards de couronnes de dettes (175 M€) et de renégocier un endettement qui se monte à 14,6 milliards de couronnes (1,3 Md€). Canal+ qu'un autre actionnaire tchèque PPF vont soutenir cette augmentation de capital, bien que les détails spécifiques de l'investissement de Canal+ restent encore inconnus.
Dans un contexte de résultats difficiles au Q2, Viaplay présente des fondamentaux appréciables, tels qu'une position de leader sur le marché scandinave, une présence notable aux Pays-Bas, et une expertise reconnue dans la création de séries scandinaves policières (connu sous le nom de Nordic Noir).
La plateforme envisage plusieurs ajustements stratégiques, dont la modification de sa diffusion de la F1 aux Pays-Bas, la vente de contenus à des tiers, la cession de certaines de ses activités au Royaume-Uni, ainsi que son retrait des marchés baltes et polonais d'ici l'été 2025.
L'intérêt de Canal+ pour Viaplay s'inscrit dans la stratégie de la société mère Vivendi de renforcer sa présence internationale. Cette stratégie comprend des acquisitions et des prises de participations, permettant une mutualisation des investissements dans des contenus originaux et le développement technologique. Viaplay, avec ses 7,3 millions d'abonnés à fin 2022, est présent dans différents marchés internationaux, dont les États-Unis et le Canada.
Récemment, Viaplay a connu une période de turbulences, marquée par une révision à la baisse de ses objectifs pour 2023 et le remplacement brutal de son président. En réponse, la société a adopté une nouvelle stratégie, se concentrant sur les marchés où elle a une présence critique comme la Scandinavie et les Pays-Bas, réduisant par ailleurs ses coûts, en particulier ses effectifs de 30%.
Malgré une croissance organique de 7 % de ses ventes, Viaplay a enregistré des pertes opérationnelles significatives, avec des dépréciations et des provisions conséquentes (qu’on imagine de catalogues, ou d’investissements marketing dans l’acquisition d’abonnés) soulignant l'urgence d'une intervention pour stabiliser la situation financière de l'entreprise.
Aveuglé 🧑🦯 : ce que l’algorithme de Spotify ne voit pas
⌛️ : 1 min 39 sec
Nancy Walecki revient pour The Atlantic sur le désormais fameux exercice marketing annuel de Spotify autour du Wrapped. Dans cette infographie animée, Spotify vous permet de revenir sur votre écoute de l’année écoulée et d’analyser pour vous votre consommation.
Cependant, la journaliste dénonce derrière cet exercice somme toute drôle de Quantified Self (le fait de traduire en tracker en chiffres nos faits et gestes les plus anodins), le manque de considération pour la signification de nos pratiques culturelles : il manque des données “émotionnelles” à l’algorithme de recommandation musicale pour saisir pleinement les goûts musicaux de ses utilisateurs.
Le “Wrapped” de Spotify peut parfois paraître réducteur ou inexact. L'article cite des exemples de personnes insatisfaites de leurs résultats Wrapped et des stratégies qu'elles utilisent pour manipuler leur historique d'écoute, comme jouer une playlist en boucle pendant qu'elles dorment, pour influencer les recommandations de l'algorithme.
La Fnac avait conçu un exercice assez amusant il y a quelques temps de réinitialisation de votre algorithme de recommandation en vous faisant écouter une playlist (appelée RESET) très éclectique sélectionnée par ses disquaires favoris.
Radio France dans la même veine avait mis au point un algorithme dit de service public pour augmenter la part de la recommandation humaine, qualitative dans les choix poussés à ses auditeurs.
Nancy Walecki aborde dans son article le concept des “théories folkloriques algorithmiques”, où les utilisateurs élaborent des histoires pour eux-mêmes se réapproprier comment la technologie interprète leurs données sans en donner le sens profond.
Cette pratique illustre un fossé entre la perception que les utilisateurs ont des algorithmes et leur fonctionnement réel, souvent opaque et constamment ajusté par les développeurs. Bien que ces théories offrent un sentiment de contrôle, elles révèlent également un désir des utilisateurs de se voir reflétés plus fidèlement dans les résultats des algorithmes.
Chaque acteur source de contenus, veut au-delà de la data science changer la manière dont les utilisateurs interagissent avec les technologies de recommandation, passant de systèmes basés sur des entrées explicites à des méthodes plus subtiles et passives de collecte de données comportementales. On pourrait résumer les choses ainsi pour parodier Einstein (?) : un peu de data science éloigne des émotions, beaucoup de data science permet (sans doute) de s’en rapprocher.
Elle conclut son article en suggérant que, malgré les efforts pour se conformer ou manipuler ces algorithmes, les moments les plus authentiques et personnels échappent (heureusement?) à cette capture. L'expérience personnelle de l'auteur avec la chanson de Willis Alan Ramsey (1972) symbolise ce décalage. L'article se termine sur une note introspective, rappelant aux lecteurs que leur identité et leurs goûts ne se limitent pas à ce que les technologies de recommandation peuvent saisir ou refléter.
Illuminé ☀️ : Joaquin Sorella, maître de la lumière
⌛️ : 1 min 2 sec
J’avais eu la chance il y a trois ans de visiter l’exposition donnée à Aix sur le maître de la lumière (n’y voyez pas d’allusion franc-maçonnique) d’origine de Valence, Joaquin Sorolla.
Depuis je traquais les occasions de le “revoir”, l’occasion m’en fut donnée le weekend dernier à l’occasion d’un déplacement à Valence en Espagne. On y célébrait les 100 ans de sa mort avec neuf expositions autour de ses œuvres (je n’en ai vu que deux expositions sur trois jours…).
La première dans la maison musée José Benlliure qui regroupe quelques dessins et des tableaux mineurs et la seconde à la Fondacion Bancaja où l’exposition A travers la lumière prend tout son sens : des œuvres majeures, lumineuses et pour une fois une sorte d’Atelier des Lumières très à propos avec le recours à l’intelligence artificielle pour animer les tableaux du Valencien et également une expérience de réalité virtuelle réussie avec une immersion dans certains des plus beaux tableaux de bord de mer en se déplaçant dans un espace balisé et QR-codée pour faire que le device audiovisuel puisse se repérer :
Pour revenir au fond, l’identité valencienne fait partie intégrante des sources d’inspiration du peintre : l’écume de la plage proche de la Malvarrosa, la lumière du soleil omniprésente (le weekend fut également très ensoleillé) et les robes les plus estivales de l’époque donnent l’occasion au peintre de démontrer son talent exceptionnel.
L’exposition est organisée par son arrière-petite-fille ce qui rajoute une touche affectueuse et aimable à la disposition aérée de l’exposition.
L’exposition tourne actuellement en Espagne et s’est vue enrichie par rapport à celle tenue à Madrid. Quarante toiles sont ici exposées avec certains inédits issus de collections privées valenciennes.
Cette exposition justifie à elle-seule le déplacement (qu’on peut même réaliser en train depuis Paris, via Barcelone).