Le Wrap Up de la semaine où Castex a reconfiné 16 départements (semaine du 15 mars)
5 bullet points : média, tech, et société avec une pointe de culture
Au sommaire cette semaine :
Invité de la semaine 🛬 : Guillaume Dumortier nous parle sommeil et tablette de nuit
Monopolisé 🤝 :TF1 le mieux placé pour reprendre M6 ?
Impacté 🏭 : Netflix calcule son impact écologique
Désossé 🦴 : l’événementiel s’interroge
Trompé 🦖 : le cerveau reptilien n’existe pas
Invité de la semaine 🛬 : Guillaume Dumortier nous parle sommeil et tablette de nuit
Je propose ce mois-ci à un ami lecteur du Wrap Up de venir écrire ici sur une tendance ou une expertise de la semaine passée. C’est de circonstance : à l’occasion de la journée mondiale du sommeil (le 19 mars), la tech s’active aussi sur ce front.
J’ai eu la chance de croiser Guillaume Dumortier à plusieurs reprises dans ma vie : d’abord sur les bancs de l’ESCP où nous nous sommes connus, où il était déjà fan inconditionnel de Daftpunk, ensuite lorsqu’il était en charge de la veille du groupe Bouygues en Californie et qu’il venait régulièrement alimenter les équipes innovation de TF1 avec ce qui s’y passait; enfin, je retombe avec plaisir sur Guillaume à chaque ouverture d’un nouveau réseau social, il fait toujours partie des early users. Il est aujourd’hui entrepreneur dans la Silicon Valley, expert sur les problématiques de growth marketing et de stratégie digitale.
Hypnotique 😴 : le sommeil, nouveau fer de lance de Google pour la maison connectée
La rencontre du sommeil et des technologies permettant de le suivre et de l’améliorer n’est pas neuve. Beaucoup d'entreprises s’y sont intéressées pour proposer des solutions grand public, sans vrai succès jusqu’à présent. Avec la station de table de nuit nest Hub, Google va-t-il réussir à craquer le code de la SleepTech grand public?
La seconde génération du Nest Hub, smart display, s’invite désormais sur les tables de nuit en y embarquant la fonction de détection du sommeil pour tracker la qualité de votre repos.
Grâce à l’ajout d’une puce radar Soli (plus d’info ici) située dans le coin supérieur droit, le Nest Hub permet non seulement de lire / mettre en pause le contenu que vous consommiez par un mouvement en l’air, mais aussi de “tracker” votre nuit.
Les solutions technologiques pour suivre et améliorer la qualité du sommeil ne sont pas neuves — Dreem, Oura ring, Halo. Google a cependant constaté le manque d’usage de ces gadgets connectés pour chambre à coucher, principalement du fait que les gens oublient de charger les montres intelligentes / trackers de fitness, tandis que d'autres n'aiment pas porter d’accessoires invasifs pour dormir. Même si 20% des Nest Hubs d'origine étaient placés dans les chambres à coucher.
Google a donc opté pour une approche sans contact et pour l’analyse de spectre fourni par le radar Soli.
Le Nest Hub de 2nde génération est doté de la fonction “Sleep Sensing” alimentée par la technologie Soli qui avait déjà fait ses débuts en étant intégré dans le Pixel 4 (smartphone fabriqué par Google) et a ensuite été utilisée dans le nouveau thermostat Nest.
“Sleep is the power source that enables you to recover and recharge. With Sleep Sensing, you get personalized tips that draw on the expertise of the American Association Sleep Medecine to improve your sleep and overall health.”
Les capteurs analysent votre sommeil en fonction de vos mouvements et de votre respiration, tout en identifiant les perturbations (toux, ronflements, fluctuations de la lumière et changements de température) qui ont un impact sur votre sommeil. Soli est une technologie idéale à cet effet car elle suit avec précision les mouvements aux niveaux macro (agitation des membres) et micro (poitrine qui monte / descend pendant que vous respirez).
Soli n'est pas une caméra qui peut vous “voir” ou vous identifier. Seuls les événements de sommeil majeurs, tels que le nombre de toux et de ronflements, sont envoyés à Google et les résultats d'une nuit peuvent être facilement supprimés le lendemain matin. Pour une fois, Google semble vraiment insister sur la protection des données en annonçant que le stockage et traitement des données se font en local, directement dans l’appareil.
En faisant le pari d’une technologie sans contact, Google enlève la plus grosse friction à l’adoption des technos de SleepTech en s’affranchissant de l’aspect invasif et inconfortable des trackers, proposant ainsi une donnée du sommeil plus fiable.
J’aurais le plaisir cette semaine de co-animer avec Eric Lentulo, un Webinar d’ESCP Media & Entertainment sur le thème de :
📰 « La Presse de demain, quel avenir pour ce média en crise ? »
avec 2 acteurs majeurs du secteur aux idées neuves :
👲 Franck Annese, Fondateur-CEO du groupe SO PRESS (Society, So Foot, Pédale, ...)
👨💻 Ari Assuied, Fondateur-CEO de Cafeyn (appli de "streaming" de la presse proposant des centaines de titres)
Animateurs : Christian Riedi et Eric Lentulo
📆 Quand ? jeudi 25 mars à 18h
Monopolisé 🤝 : TF1 le mieux placé pour reprendre M6 ?
Pour faire suite aux différentes spéculations autour du rachat de M6 (on en parlait ici), il semblerait d’après différentes sources de presse, que ce soit TF1 qui ait remis l’offre la mieux disante dans le cadre d’un premier tour organisé par la banque JP Morgan mandatée par Bertelsmann.
La Lettre A ($) explique cette meilleure offre, par :
l’important recoupement des périmètres des deux groupes et donc des synergies pouvant en résulter;
une configuration qui pourrait laisser penser que TF1 pourrait détenir 100% du groupe M6 (contrairement aux autres prétendants), car il est déjà lui-même dans la situation où Bouygues, actionnaire à 43% du groupe tricolore, est déjà limité par la règle de 49%1.
Bien sûr, cette dernière explication ne tient pas compte de l’examen, qu’on peut penser très scrupuleux, qu’accompliraient les Autorités de Concurrence si l’opération devait être présentée, ayant en tête que le CSA a déjà un dispositif anti-concentration important :
- analogique : 1 seule autorisation par société (disposition justifiée compte tenu de la rareté des fréquences analogiques)
- numérique : 7 autorisations par société;
Or si l’on fait les comptes :
TF1 : 1 licence nationale hertzienne / + 4 licences “numériques” : TMC, TFX, LCI, TF1 Séries Films
M6 : 1 licence hertzienne / + 3 licences “numériques” : W9, 6Ter, Gulli
(Je ne rentre pas dans les subtilités de la détention de 2 médias sur 3 d’informations nationales avec la présence de la radio RTL dans la corbeille).
Il y a donc dans la perspective de cette alliance inédite, une “chaîne [nationale] de trop” … (intention qui était exactement celle du législateur au moment de la création de cette loi, lorsque la Gauche a annulé les dispositions qu’avait prises la Droite lorsqu’elle a porté sur les fonts baptismaux la 5 et Métropole TV) et comme il est peu vraisemblable que TF1 fasse tout cela pour acheter uniquement les chaînes TNT de M6… Le risque anti-concurrentiel demeure élevé.
Afin que Bertelsmann consente à rentrer en négociation exclusive avec un TF1, il va sans doute falloir que ce risque juridique soit porté par l’acquéreur, en d’autres termes : il est vraisemblable que TF1 porte vis-à-vis du cédant RTL, une partie du risque (financier) de voir son projet initial amendé par les Autorités de Concurrence.
Tout reste question d’arbitrage : combien TF1 serait prêt à risquer pour ne pas voir un nouvel actionnaire au capital de son concurrent commercial le plus important, dans les prochains mois (après on ne sait jamais ce qui pourra se passer) ?
Feuilleton à suivre …
Impacté 🏭 : Netflix calcule son impact écologique
Quand on commence à représenter près de 25-30% de la consommation de bande passante du pays aux heures de pointe, il n’est pas anormal pour une société soucieuse de son image de s’apesentir sur le coût écologique de son service.
Cette semaine, en utilisant la méthodologie de l’Université de Bristol (l’indicateur d’impact du digital : DIMPACT), Netflix a indiqué qu’une heure de consommation de son service équivalait à 100g de CO2e (équivalent nous dit l’article à 6h de ventilo ou 40 minutes de climatiseur en mix énergétique européen). En soit difficile de dire que le chiffre fasse réellement peur. Cependant ce chiffre est à considérer à l’aune de sa base abonnés (200m dans le monde, près de 8m en France) et de la durée moyenne de consommation (de mémoire, 20h par semaine environ en France pour ses abonnés).
Netflix pour prendre le taureau par les cornes va publier fin mars, un livre blanc sur sa trajectoire de neutralité carbone. A titre de comparaison, Microsoft s’est engagé sur un horizon de 2030 pour être carbone négatif, Amazon à horizon 2040. De son côté, Google a communiqué sur le fait d’avoir d’ores et déjà payé sa dette carbone, en étant “carbon neutral” et cela depuis sa création et promet d’être carbon-free d’ici 2030, c’est à dire de ne s’approvisionner qu’auprès de fournisseurs d’énergies renouvelables. Pour mémoire, Netflix n’utilise depuis 2016 quasi-exclusivement que les serveurs d’Amazon (AWS) pour la diffusion de ses vidéos. Ces deux-là doivent donc dans un calcul à 360 (savamment appelé Scope3, c’est à dire fournisseurs et clients compris) trouver des moyens de coopérer dans la réduction de leurs impacts respectifs…
Personne ne s’étonnera pour autant de l’impact de la vidéo digitale, dès lors que la diffusion point-à-point (le service à la demande) remplace pour partie le diffusion “broadcast” (quelques gros émetteurs d’ondes radio reçus par un récepteur dans chaque foyer).
According to Channel4, the seven billion YouTube views of hit song “Despacito” amounted to a figure that would mean YouTube required more electricity annually than the amount used by all the data centres and data transmission networks in the world.
En 2019, le Shift Project (comme son nom l’indique un thinktank français, présidé par Jean-Marc Jancovici) avait estimé dans une interview de façon erronée, la consommation de 1 heure de Netflix à 3,2Kg de CO2e, soit près de 32 fois le chiffre aujourd’hui avancé. Le Shift Project a depuis reconnu l’erreur de l’interview qui a fait tâche d’huile, mais maintient son estimation à 400g de CO2 par heure de vidéo consommée (note détaillée ici).
Pour rappel, au global, les Français, grâce à un mix énergétique porté par le nucléaire, n’émettent “que” 11,9 tonnes équivalent carbone par an (18T pour les US, 6 pour les Chinois). Pour être neutre en carbone, il faudrait que nous soyons tous à 2 T CO2e par an.
Désossé 🦴 : l’événementiel s’interroge
Brian Morrissey, président du groupe de médias digitaux Digiday, tient, évidemment, une newsletter The Rebooting. Dans la dernière édition, il revient sur la fragmentation de l’événementiel, en détaillant des futurs possibles pour cette industrie extrêmement mise à mal par la crise sanitaire.
Voici quelques unes de ses réflexions bien senties sur son avenir :
les salons d’entreprise (beaucoup de large techs en B2B) vont prospérer, comme moyen d’attirer ou de retenir les clients (on pense à Dreamforce de SalesForce ou encore à Microsoft Envision). A l’inverse, les salons de média miseront davantage sur un sponsor unique (comme Vogue Business avec TikTok qui espère compter sur les marques de luxe sur sa plateforme).
De nouveaux prix : la virtualisation des événements, avec son lot d’événements quasi-gratuits va durablement affecter le pricing des événements. Alors que monter une room dans Clubhouse est à quelques clics et la qualité plutôt au rendez-vous, il est vraisembable que la déflation soit brutale avec nombre d’événements sous les 100 €.
Les abonnements à des salons vont croître : à la faveur d’un modèle économique, celui de l’abonnement, qui pousse partout, de Deliveroo à Netflix, il n’y a pas de raisons pour que ce phénomène ne touche pas les salons et foires, tout particulièrement pour les événements qui prennent des airs de formation continue (voir en celà la belle réussite du Hub Forum, qui s’est fait tour à tour Social Media, Future of Retail, Nouvelles Mobilités, RH).
L’événementiel comme outil de rétention des clients. Après le gain de tous les services en ligne en 2020, la plupart des services vont devoir faire face au mûr du churn. Des publications comme The Economist montent des événéments assez économiques à la seule destination de leurs abonnés pour renforcer le caractère exclusif de ce statut.
Le marché va secouer. Face à la profilération d’événements des dernières années, l’avenir de l’industrie repose aussi pour partie sur une reprise du tourisme d’affaires que les meilleurs spécialistes ne situent pas avant 2024 !
Trompé 🦖 : le cerveau reptilien n’existe pas
Si comme moi, on vous a gavé dès l’adolescence, de pseudo-cours de sciences cognitives ou autre psychologie & management (aimablement renommé PsychoPipo) ou encore des thèses d’Henri Laborit passées au tamis d’Alain Resnais avec son film Mon Oncle d’Amérique (avec Gérard Depardieu en cadre sup ulcéré), vous appréciez ce podcast de France Culture qui démonte ce lieu commun du développement personnel et du management contemporain : LE CERVEAU REPTILIEN N’EXISTE PAS.
On doit la notion de « cerveau reptilien » à un neuroscientifique américain, Paul MacLean, qui dans les années 60, la place au coeur de sa théorie dite du "cerveau triunique". Selon cette théorie, le cerveau humain serait partagé en trois parties distinctes, correspondant chacune à une étape de l’évolution de l’espèce.
Or cela fait des années que les scientifiques spécialistes de ces disciplines tentent de déconstruire ce mythe :
Des burritos pour la route 🌯 : liens rapides
Facebook a annoncé vouloir rentrer dans la danse des newsletters.
Autre petite news intéressante concernant Netflix cette semaine, le lancement par la plateforme d’une nouvelle catégorie de nouveaux formats courts (coucou Quibi) destinée à tirer également profit du phénomène de snacking vidéo sur lequel surfe Tiktok, Snapchat ou encore à leurs basques Instagram. La plateforme au N rouge lance donc Fast Laugh uniquement sur la comédie et l’humour (extrait de son catalogue), disponible uniquement sur mobile. Intéressant de voir Netflix s’essayer à un autre mode de consommation par rapport à la formule qui a fait son succès (les 20 premières séries de Netflix avait une durée moyenne d’épisode de 40 minutes).