Le Wrap Up de la semaine de la sortie du Apple VisionPro (semaine du 5 février 2024)
🛍️ : Tiktok met de l’ecommerce partout - 🤝 : alliance dans le streaming sportif US - 🔀 : l’ePub explose - 🌊 : Patino diagnostique notre époque - ♾️ : l'exposition virtuelle de Notre-Dame
L’Apple Vision Pro (test produit) a fait couler beaucoup d’encre cette semaine et on a vu les vidéos les plus absurdes être diffusées sur son utilisation dans la rue. Un consensus parmi les experts semble curieusement se dessiner autour de l’idée qu’Apple n’y croit pas vraiment (malgré les 200 000 ventes enregistrées cette première semaine) : ce nouveau produit de la gamme Apple viserait à d’une part s’acheter une option si la réalité augmentée devait réellement devenir massive (sous entendu : pas tout de suite), d’autre part à contrecarrer Meta1 qui continue de miser massivement sur ses casques Oculus… A suivre.
Au sommaire de cette semaine :
⏳Temps de lecture : 7 min 17 sec
Marchand 🛍️ : Tiktok met de l’e-commerce partout
⏳: 1 min 43 sec
TikTok se rêve en colosse du commerce électronique : l'application teste actuellement une fonctionnalité reposant sur l’IA qui viserait à infuser de l’e-commerce au cœur des vidéos normales sur le réseau social.
L'an dernier, TikTok Shop aux États-Unis et au UK marquait déjà une ère nouvelle, permettant aux créateurs de marquer leurs vidéos avec des produits achetables directement depuis la plateforme, une aubaine pour les marques désireuses d'étaler leur catalogue de produits.
Mais voici que Tik Tok tente de pousser le bouchon un peu plus loin : Tiktok a prévu l'identification automatique des produits dans une vidéo, accompagnée d'un lien judicieux « Trouver des articles similaires sur TikTok Shop », sans nécessairement demander le consentement du créateur de la vidéo pour l’insertion de ces liens (et le director’s cut alors ?).
Ainsi, imaginez, chaque vidéo acquiert un potentiel marchand. Le but affiché par la filiale de ByteDance est de décupler le volume d'affaires de TikTok Shop visant 17,5 Md$.
Avec des plans de conquête vers l'Amérique du Sud, TikTok veut y jouer des coudes avec des géants comme Amazon et des compétiteurs chinois tels que Temu et Shein.
Mais cette expansion fulgurante n'est pas sans susciter des remous. Des voix s'élèvent, notamment aux États-Unis, où des utilisateurs expriment leur mécontentement face à cette invasion commerciale, nostalgiques d'une époque où TikTok rimait avec divertissement et “information” plutôt que galerie commerciale.
Parallèlement, la croissance explosive de TikTok connaît un essoufflement global : la hausse de ses utilisateurs actifs mensuels a sensiblement ralenti en 2023, passant de +12% à seulement +3% l’an dernier.
Dernier volet de cette expansion commerciale : le géant chinois souhaite ouvrir ses propres studios à Los Angeles, rapporte The Information, afin que les créateurs diffusent des vidéos en direct depuis ses locaux sur le sol US et y vendent des produits, comme le désormais paradigmatique social shopping en Asie.
Alliés 🤝 : megadeal dans le streaming sportif US
⏳: 1 min 41 sec
La réponse ne se sera pas fait attendre trop longtemps : sitôt Netflix annonçait un accord pour rentrer dans l’arène du sport live, avec un deal record de 5 milliards de dollars sur 10 ans pour le match principal de la semaine de la ligue de catch WWE, que Disney, Fox, Warner Bros et Discovery répondaient qu’il formait une alliance pour lancer un nouveau service de streaming sportif aux US :
Le service de streaming sportif sera lancé cet automne dans un contexte où les chaînes sportives du câble touchent un public toujours moins nombreux (le nombre de foyers américains abonnés à la télévision par câble a chuté ces dernières années, de 100 millions à 70 millions).
Le service sera une sorte de super-bundle, réunissant 14 chaînes diffusant du sport, incluant ABC, ESPN, Fox Sports, ainsi que le service de streaming ESPN+.
The new service will cost less than a typical cable bundle and will feature programming from the NFL, NBA, MLB, NHL and other professional sports leagues currently broadcast across an array of linear and direct-to-consumer offerings. Together, the offering could account for about 55% of U.S. sports rights, according to Citi analysts.
Ce bouquet promet ainsi une gamme étendue de contenus sportifs, mais aussi, curieusement, des programmes non sportifs comme "The Simpsons" et "The Bachelor". Cette offre hybride, un pied dans le streaming (elle pourra être bundlée avec les plates-formes de streaming de chacun des membres de l’alliance, Disney+, Hulu ou encore Max), l'autre dans le câble, témoigne d'une stratégie visant à séduire les amateurs de sport tout en gardant un œil sur l'attrait universel des contenus traditionnels.
Le coût de l'abonnement est encore inconnu, on peut néanmoins anticiper un tarif se situant quelque part entre le coût d'un abonnement à un service de streaming standard et celui d'un forfait télévisuel complet (aux environs de 100 USD), avec la promesse d'une expérience « enrichie » par des publicités.
Le service ambitionne de centraliser l'offre sportive, mais il est cependant loin de couvrir l'intégralité du paysage sportif. Les droits de diffusion étant éparpillés entre divers détenteurs, les abonnés à ce nouveau service devront probablement compléter leur consommation sportive avec d'autres abonnements, qu'ils soient digitaux ou traditionnels.
Le service est plutôt un mouvement défensif et se positionne comme une alternative pour les gros fans de sport désirant se désabonner du câble, offrant ainsi un accès à une large part du contenu sportif à un coût qui pourrait s'avérer au global être plus avantageux.
La réponse de Disney, Fox et Warner Bros. Discovery est in fine un pari sur un avenir où le streaming et le câble continuent de coexister, classique d’un service qui tente de coller au nouveau usage sans renoncer au gros de la monétisation actuelle…
Décorrellée 🔀 : l’ePub fait sauter les compteurs
⏳: 1 min 19 sec
Selon toute probabilité, en 2024, la publicité numérique en France dépassera les 10 milliards d'euros, selon les prévisions de l'Observatoire de l'e-pub SRI, réalisées avec Oliver Wyman et en partenariat avec l'Udecam.
Ce jalon symbolise un “ralentissement” de la croissance annuelle à 8 % (10 % en 2022 et 9 % en 2023) mais il reste, il faut le dire, impressionnant. En dépit de ce ralentissement, la pub digitale affiche une vitalité supérieure aux médias traditionnels, avec une progression considérable depuis les 3 milliards d'euros en 2014. En comparaison, le marché de la publicité télévisuelle devrait atteindre un peu plus de 3,5 milliards d'euros en 2024, le numérique représentera alors 63,5% du marché publicitaire français.
L'année 2023 a connu deux phases : lente au premier semestre (+5%) suivi d'une accélération notable (+13%) lors du second semestre. Le secteur du « retail media » a particulièrement brillé, enregistrant une croissance de 24 % et dépassant pour la première fois le milliard d'euros, principalement grâce à Amazon qui capte plus de 70% de cette croissance.
Les géants du numérique, Google, Meta et Amazon, ont consolidé leur emprise sur le marché, représentant 68 % de la part du marché de la publicité numérique française en 2023, avec une tendance à la polarisation du marché en faveur des acteurs non européens qui ont raflé 78 % du total (avec l’aide de Tiktok donc).
Bien que faisant figure de vieux jeu, les formats "search" et "social" ont dominé, capturant environ 80% de la croissance du marché, et même le search payant dépassant les 4 Md€, mené par Google, et le "social" progressant de 11,7 %, boosté par la vidéo et les formats courts.
Evidemment, la croissance ne bénéficie pas à tous de manière égale : les plateformes de streaming vidéo et musical ont vu leur part dans le "display" augmenter de 12 %, surpassant les sites d'édition et d'information, qui ont, eux, enregistré une baisse de 6%, une première en dix ans.
Cette situation révèle un transfert budgétaire des annonceurs vers les géants du numérique, exacerbant un cercle vicieux de dévalorisation pour les acteurs de la presse traditionnelle.
Submergé 🌊 : Bruno Patino diagnostique notre époque
⏳: 1 min 25 sec
Bruno Patino est président d’Arte France et pratique assidûment la natation. De la première information, on peut déduire que cela lui donne un poste d’observation de l’évolution de notre environnement médiatique depuis les prémices de la révolution numérique (il a fait ses premières armes aux balbutiements du Monde.fr), de la seconde, on comprend plus aisément d’où lui vient la série de livres aux connotations aquatiques, qu’il publie pour rendre compte de cette évolution : la civilisation du poisson rouge (2019), tempête dans un bocal (2020).
Avec Submersion, livre sorti cette année, il récapitule chirurgicalement comment nous en sommes arrivés là : là, c’est la prédominance des écrans dans nos vies et la démultiplication des contenus accessibles au bout de nos doigts sans efforts, une telle hyper-offre se traduisant par un sentiment de démobilisation devant cet hyper choix. Phénomènes qui ne vont pas s’améliorer avec la déferlante de l’IA qui va décupler la production de contenus.
« Nous avons perdu la nuit. Les écrans sont arrivés, et avec eux la connexion permanente. Voici venu le temps de l’aube perpétuelle. De la lueur bleutée qui jamais ne s’éteint, du rayonnement qui jamais ne s’apaise. Eveillés, hagards, hébétés, nous sommes irrémédiablement attirés par leur lumière. Finies les insomnies, place à l’a-somnie et aux veilleurs sentinelles, à ceux pour qui la nuit n’est plus qu’une séquence hypnotique entre mauvais sommeil et connexion décevante. Je suis l’un d’entre eux. »
Patino reste philosophe, il appelle à ce que nous nous resaississions et que nous reprenions le contrôle sur le contenu que nous consommons, que nous exercions notre libre arbitre, avançant que les algorithmes ne sauront jamais tout à fait nous saisir, il en va pour lui de la survie de notre espace démocratique commun.
Certes, son propos sert le bilan de son action à la tête de cette télévision intelligente qu’est Arte, une télévision de “remédiation” pour laquelle il fait le choix de l’hyperdistribution sur toutes les plateformes (la monétisation, redevance oblige, n’est pas vraiment son sujet), toucher le plus grand nombre sans se dévoyer l’est!.
Le livre est richement sourcé et a le mérite de remettre les choses en perspectives, cependant on reste un peu sur sa faim quant aux remèdes esperés, peut-on espérer un “ressac” salutaire ? si oui comment ?
🌯 : Burritos pour la route
Beaucoup d’autres infos intéressantes cette semaine :
🎫 UGC relance les cartes d’abonnement au cinéma, à travers notamment un bundle jeune avec Canal+
🎶 Faute d’accord financier, Universal Music retire ses catalogues de Tik Tok
Eternelle ♾️ : l’exposition virtuelle autour de Notre-Dame
⏳: 51 sec
C’est une très belle expérience qui se tient en ce moment sur le Parvis de Notre Dame (également disponible à la Défense) : la visite de la cathédrale Notre Dame au cours des siècles (et pendant 45 minutes).
Guidé par un compagnon du devoir, les visiteurs (possiblement en groupe) peuvent déambuler autour et à l'intérieur de la cathédrale recréée numériquement. 800 ans d'histoire défilent depuis la pose de la première pierre de Notre-Dame au XIIe siècle, jusqu’à l’incendie du 15 avril 2019. Les créateurs du parcours se sont faits plaisir au point d’imaginer la remise des clefs à l’évêque de Paris lorsque la reconstruction sera achevée (réouverture prévue pour le 8 décembre 2024!)
Les visiteurs qui évoluent sur une surface de 500 mètres carré avec batterie et casque virtuel, assistent à la pose d’une rosace, déambulent sous la charpente, grimpent dans le beffroi, le tout ponctué d'éléments de contexte sur l'évolution du travail des artisans et les grandes figures qui ont marqué l'histoire de l'édifice, en particulier Viollet-le-Duc.
Un tiers du prix des (onéreux) billets ira au financement du chantier de la reconstruction, mon conseil : prévoyez une visite en groupe, le billet passe de 30 à 20 euros par personne.
Je recommande (sauf aux personnes souffrant de vertige…)
et ses 39 milliards de profits l’an dernier !