Lu : Sans La Liberté de François SUREAU
Un petit texte incisif de François Sureau, personnage ambivalent de la Vème République, public et caché, avocat auprès du Conseil Constitutionnel et de la Cour de Cassation et visiteur du soir, qui a le mérite de vouloir revivifier notre attachement à la liberté, valeur cardinale et même suprême de nos sociétés politiques européennes.
Il s’alarme avec justesse de notre passivité en tant que citoyen devant le recul de nos droits et de notre liberté, au profit d’un État toujours plus invasif et d’une administration toujours plus prompt à encadrer et contrôler au motif de l’efficacité.
Il est particulièrement alarmé par les lois d’exception qui sont votées à la hâte par un parlement qui a abdiqué son rôle de gardien des libertés, en soulignant que toutes les entorses faites au nom de la lutte contre le terrorisme (et aujourd’hui peut-être au nom de la crise sanitaire du Covid19) finissent implacablement par dériver et par s’appliquer à des sphères communes qui n’avaient rien à voir avec le problème initial qu’elles prétendaient contrer.
Malgré des imprécations brillantes, l’essai souffre du manque d’exemples et d’analyses sur ces dérives. Il a en outre le mérite de rappeler l’unicité tracée par nos sociétés européennes, en ce qu’elles pensent que la liberté et son corollaire le droit d’opposition sont les meilleures solutions vers une société meilleure.
Sans liberté, il n’y a rien en ce monde. (Chateaubriand)
Pour être averti(e) de chaque sortie du Wrap Up :
McLuhanisé : un remarquable article de The Economist qui explique comment le streaming modifie le format même des “arches narratives” des séries, rompant avec les saisons interminables des sitcoms des années 80-90 au profit de saisons plus courtes, plus explosives en termes d’ouverture et de cliff-hangers.
Unless a show is a mega-hit like hbo’s “Game of Thrones”, explains Leigh Brecheen, an entertainment lawyer in Hollywood, it now makes more financial sense to produce something new rather than renew something old.
Utile à savoir : courte vidéo (15’) d’une intervention d’Alexander Osterwalder (le théoricien du Business Canvas Modeling) sous le titre un peu racoleur de “How To Build Invicible Companies”. Il y distingue les deux portefeuilles des entreprises à succès: l’exploration de nouvelles idées ET l’optimisation de business profitables existants, chacun répondant évidemment à des KPIs bien spécifiques.
Sur les activités innovantes, il interpelle, non sans humour, son auditoire pour connaître le nombre d’initiative à 1 M$ qu’il faut financer en interne pour qu’émerge une nouvelle ligne d’activité digne d’une licorne (“a multi-billion dollar business”).
La réponse est de … 250 (source : association américaine des VCs), avec 162 échecs, 87 qui connaîtront un certain succès et .. 1 qui deviendrait un véritable relais de croissance.
La prochaine fois que le CEO de Big Corp vous dit qu’il faut encourager la “culture de l’échec”, je vous laisse lui souffler ces chiffres à l’oreille pour savoir s’il veut vraiment commencer par perdre 162 M$ dans des projets sans avenir. Car une chose est certaine : nous ne savons pas prédire ce qui va marcher, et donc cela nécessite d’être à l’aise avec l’échec (dont il faut bien sûr tirer les leçons).
Failure and success are inseparable twins (Jeff Bezos)
La citation (radicale) de la semaine par le philosophe Bruno LATOUR dans une intervention à la Villa Medicis fin mars :
Nous devenons d’efficaces interrupteurs de globalisation.
De fil en aiguille, si nous commençons, chacun pour notre compte, à poser de telles questions sur tous les aspects de notre système de production, nous devenons d’efficaces interrupteurs de globalisation – aussi efficaces, millions que nous sommes, que le fameux coronavirus dans sa façon bien à lui de globaliser la planète.
Pour nuancer et pour aller plus loin que cette remise en cause assez radicale, je vous suggère deux très articles de fond sur la même thématique du monde qui vient :
un article qui accueille favorablement le rôle accru de nos Etats dans l’économie à l’issue de cette crise mais qui souligne aussi que la puissance publique ne sera pas seule capable de nous faire changer nos modes de vie : sur le site de l’IDDRI, un think tank qui facilite la transition vers le développement durable.
un article de The Conversation qui prône la “reconstruction” à l’instar de l’Après Guerre de 1945 vs. la reprise économique, tout en soulignant la contradiction évidente entre une démondialisation / relocalisation de la production, et une coopération inter-gouvernementale / multilatérale renforcée pour faire face aux défis planétaires …
Idée business de la semaine : le journal par SMS
Difficile d’imaginer à quoi ressemblera l’après Covid pour les médias et la presse. Frédéric Filloux, homme de Presse, entrepreneur et professeur sur les médias, a fait planché ses élèves sur le sujet (sujet dans sa très bonne newsletter sur les médias Monday Note). A côté de certains lieux communs et un peu de naïveté, on trouve une certitude : la Presse ne sera pour eux, plus jamais papier.
Dans cette veine, c’est l’initiative de The New Paper que de proposer un journal par SMS. Avec une approche radicale : The News is Broken, We cut through the noise. Curated by Humans, Fact First, Convenient Delivery.
Avec des taux d’ouverture des SMS de l’ordre de 90% et une lecture dans les 3 minutes après réception, on peut difficilement faire mieux…
Portez-vous bien !