Le Wrap Up "light" de la semaine où la France a explosé son score de médailles olympiques (semaine du 5 août 2024)
📺 : la TV réalité, préfiguration d'internet - 💔 : les apps de dating en berne - 🧑⚖️ : Google condamné pour pratiques anticoncurrentielles - 🐳 : Moby Dick au bord de la piscine
Au sommaire de cette semaine très TV olympique :
⌛️ Temps de lecture : 6 min 38 sec
Préfiguré 📺 : la TV réalité inventa internet
⌛️ 1 min 17 sec
The Economist plonge dans l’ouvrage Cue The Sun d’Emily Nussbaum traitant de l’histoire des émissions de télé-réalité, souvent décriées comme des "documentaires sales", pour en dévoiler les aspects moins évidents mais significatifs.
(Vous pouvez aussi lire les posts linkedin du vendredi de l’ami Valentin Kleinpoort qui replonge dans les archives des TV réalités avec sa rubrique : WTF ça a existé).
Les émissions de télé-réalité, souvent perçues comme des spectacles dégradants ou des "zoos humains", ont pourtant, il faut bien l’admettre, abordé des thèmes sociaux épineux bien avant que les programmes scénarisés ne s’y attaquent.
En analysant des décennies de ces émissions, Nussbaum démontre que, malgré leur apparence superficielle et choquante, ces programmes reflètent des vérités sur la société et le public.
Les origines de la télé-réalité remontent aux années 1940 avec des émissions radiophoniques comme "Candid Microphone", une précurseur des caméras cachées. Ces émissions ont capté l’attention en confrontant les participants à des situations extrêmes pour le divertissement des auditeurs. Au fil des décennies, la télé-réalité a su capter des audiences massives en exploitant des situations dramatiques et des thèmes controversés, souvent en s’affranchissant des contraintes des programmes scénarisés.
Nussbaum met en lumière comment la télé-réalité a permis de mettre en scène des individus et des groupes marginalisés, souvent absents des programmes traditionnels.
Des émissions aux US comme "Queen for a Day" ou "The Jerry Springer Show" ont montré des facettes de la société que les séries scénarisées d’Hollywood ignoraient. La télé-réalité a également été pionnière dans la normalisation de la représentation des minorités sexuelles, avec des émissions comme "An American Family" dans les années 1970.
Par ailleurs, ces formats ont été aussi des succès économiques formidables :
Despite their low budgets, reality shows promise high ratings—and the biggest shocks have tended to deliver the biggest numbers. Producers have become experts at “panning for ratings gold in the rapids of outrage”, as Ms Nussbaum puts it.
Cependant, le format a aussi ses côtés sombres. Les participants de ces émissions ont souvent subi des traumatismes physiques et émotionnels, et certains ont même été manipulés pour créer des moments plus dramatiques à l’écran (vous reprendrez bien un peu de jacuzzi?).
The first person voted off the Swedish version of “Survivor” committed suicide (the show aired anyway). The first winner of the Dutch “Big Brother” had a nervous breakdown. Many struggle to deal with fame that comes without fortune. The original cast of “The Real World” were paid just $2,600 each.
Nussbaum souligne que la télé-réalité a non seulement influencé la culture populaire, mais a aussi anticipé les dynamiques des réseaux sociaux actuels, où l’authenticité et l’artifice coexistent de manière complexe.
Selon Nussbaum, pour comprendre les origines de la culture moderne des médias sociaux, il faut étudier ces "documentaires sales" fenêtre sur la culture populaire et l’évolution des moeurs.
Antitrusté 🧑⚖️ : Google condamné pour pratiques anticoncurrentielles
⌛️ 1 min 22 sec
Dans un jugement considéré comme historique, Google a été reconnu coupable d'avoir maintenu illégalement un monopole sur le marché de la recherche en ligne (what??).
Le juge Amit P. Mehta du tribunal fédéral de Washington a jugé que Google avait abusé de sa position dominante en payant des milliards de dollars pour être le moteur de recherche par défaut sur les appareils comme ceux d'Apple (18 Md$ en 2021 !) et Samsung, empêchant ainsi ses concurrents de rivaliser équitablement, compte tenu de la position que le moteur de recherche de Mountain View occupait déjà.
After having carefully considered and weighed the witness testimony and evidence, the court reaches the following conclusion: Google is a monopolist, and it has acted as one to maintain its monopoly.”
Le procès, qui a duré plusieurs années, a été initié par le ministère de la Justice et plusieurs États américains, affirmant que Google utilisait ces accords pour renforcer sa domination, générant ainsi des milliards de dollars de revenus annuels.
Ce jugement marque un tournant majeur, car il représente la première grande décision antitrust contre un géant de la technologie dans l'ère moderne de l'internet. Il pourrait influencer d'autres poursuites similaires en cours contre des entreprises comme Apple, Amazon et Meta (anciennement Facebook).
Google tellement rentré dans les moeurs qu’il est devenu un verbe, pourrait voir cette décision affecter sérieusement son modèle économique, en particulier alors qu'il se trouve justement challengé par de nouveaux entrants technologiques soutenus par ses concurrents comme OpenAI avec Microsoft.
Judge Mehta ruled that Google’s monopoly allowed it to inflate the prices for some search ads. That, in turn, gave the company more money to pay for its search engine to get prime placement, he said.
“Unconstrained price increases have fueled Google’s dramatic revenue growth and allowed it to maintain high and remarkably stable operating profits,” he said in the ruling.
Toutefois, le juge n'a pas encore imposé de sanctions spécifiques, laissant la porte ouverte à des changements potentiellement drastiques dans les opérations de l'entreprise ou même à une scission de ses activités.
Du côté de Google, on prévoit évidemment de faire appel de la décision, arguant que leur moteur de recherche est simplement le meilleur sur le marché et que les utilisateurs le choisissent librement pour sa qualité (même si le jugement révèle que 50% des requêtes sont faites via les partenariats que Google a établis, 28% pour Apple, 20% pour Chrome, le navigateur de… Google.)
Cependant, le jugement du juge Mehta (oui how ironic) soutient que la stratégie de Google a injustement limité la concurrence et augmenté les prix des publicités en ligne, renforçant ainsi son monopole.
Cette affaire rappelle le précédent de l'affaire antitrust contre Microsoft dans les années 1990, mais avec des implications potentiellement plus vastes, car elle s'inscrit dans un contexte où le gouvernement américain cherche activement à limiter le pouvoir des grandes entreprises technologiques, tant sur le plan national qu'international. La décision pourrait ainsi donner un coup de fouet aux autres actions antitrust en cours, en renforçant la détermination des autorités à encadrer les pratiques monopolistiques des géants de la tech.
Pour aller plus loin lisez le thread de Marie Haynes, une mine d’infos sur ce qu’a révélé le procès conter Google et ses façons de travailler.
Désaimé 💔 : les apps de dating en berne
⌛️ 1 min 12 sec
L'article de The Economist analyse le déclin des applications de rencontres comme Tinder et Bumble, autrefois très populaires mais désormais confrontées à une désaffection croissante de la part des utilisateurs.
Ces applications avaient révolutionné les rencontres en ligne en rendant le processus simple et ludique, attirant des millions d'utilisateurs. Cependant, après une période de croissance rapide, marquée par des valorisations boursières impressionnantes, le marché montre aujourd'hui quelques signes d'essoufflement.
Plusieurs facteurs expliquent cette désillusion :
D'abord, les utilisateurs trouvent de plus en plus frustrant de devoir passer au crible des milliers de profils pour trouver une connexion “significative”.
Les femmes, en particulier, se sentent souvent submergées par le nombre de messages reçus, ce qui crée un déséquilibre et une fatigue numérique.
De plus, la majorité des utilisateurs sur ces plateformes sont des hommes, ce qui accentue cette dynamique déséquilibrée.
Un autre problème réside dans la monétisation croissante des services, avec des options payantes de plus en plus coûteuses, mais dont la valeur perçue reste faible.
Les utilisateurs semblent réticents à payer pour un service qui, à leurs yeux, n'apporte plus les résultats escomptés. Cette réticence se traduit par une baisse du nombre d'utilisateurs payants, notamment sur Tinder, où ce chiffre diminue depuis sept trimestres consécutifs
Enfin, relativisons tout de même :
The apps were downloaded 237m times globally last year, down from 287m in 2020. According to Sensor Tower, another research firm, the number of people who use them at least once a month has dwindled from 154m in 2021 to 137m in the second quarter of this year.
Même si la désaffection chez les jeunes est réel :
Younger adults are growing especially weary of the apps. One survey commissioned last year by Axios, a news site, found that only a fifth of American college students were using them at least once a month.
Enfin, le phénomène de retour aux rencontres "hors ligne" se développe. Des initiatives comme les événements in real life (comme Timeleft justement), ou encore les clubs de course et les cours de cuisine, deviennent des alternatives attrayantes pour ceux qui cherchent à rencontrer des partenaires potentiels dans des contextes plus naturels et moins artificiels que ceux offerts par les applications.
Face à ces défis, les applications de rencontres tentent de se réinventer en explorant des niches spécifiques, comme Grindr pour les hommes gays ou Feeld pour les polyamoureux, tout en intégrant des technologies comme l'intelligence artificielle.
Cependant, la réussite de ces stratégies reste incertaine, et la question de savoir si les applications de dating peuvent renouer avec leur succès passé demeure ouverte.
Lu 🐳 : Moby Dick d’Herman Melville
⌛️ 30 sec
C’est un livre “fleuve” de 740 pages, mais désormais un des livres essentiels de la littérature mondiale : Moby Dick d’Herman Melville a commencé à accompagner mes premiers jours de vacances et avec lui le rythme lancinant de la pêche à la baleine au milieu du XIXème siècle, quand l’huile de baleine éclairait le monde et faisait prospérer une industrie maritime.
Evidemment, si le livre, méconnu jusqu’à la mort de l’auteur, est devenu l’un des classiques (redécouvrez aussi pourquoi lire des classiques avec Italo Calvino), c’est aussi parce que l’ouvrage livre un nombre impressionnant de considérations politiques, religieuses, économiques ou ethnologiques de son temps et qu’il met en place une dramaturgie extraordinaire du combat singulier entre le capitaine du Pequod, Achab et le cachalot monstre, Moby Dick, en plus de châtier une langue poétique et renouvelé en permanence pour pourtant décrire la même chose.
A lire cet été aux bords des flots.