Le Wrap Up "light" de la semaine où l'explosion de Beyrouth a eu lieu (semaine du 3 août 2020)
La version allégée-summer body du Wrap Up : 2 bullet points / 1 reco culturelle
Congés estivaux obligent, l’activité de cette newsletter est légèrement réduite : je vous propose de retrouver deux bullet points et une recommandation culturelle pour supporter la canicule.
Cette semaine :
Décrété 📖: TikTok et WeChat interdits sous 45 jours aux Etats-Unis ?
Dénoncé 📢 : qui dit le Vrai sur les réseaux sociaux ?
Lu 📖 : Le Chien Jaune de Simenon
Décrété 📖: TikTok et WeChat interdits sous 45 jours aux Etats-Unis ?
Du loin de votre repos estival, vous avez peut-être suivi les deux Executive Orders du Président Trump au sujet des entreprises ByteDance éditeur de TikTok et de Tencent éditeur de WeChat éditeur de WeChat (qui combine pour faire vite : Facebook, Google, Amazon, Tinder, Instagram et Snapchat, tous interdits ou bloqués en Chine). Les participations de Tencent Holdings sont partout dans le divertissement : Universal Music (à hauteur de 10%), Riot Games (League of Legends), Epic Games (Fortenite, Houseparty), mais aussi Supercell, Ubisoft et Blizzard, jusqu’à une participation lors la dernière levée du français Lydia) [Le JDD de dimanche en dresse le portrait ici]
Ces décisions présidentielles qui visent à interdire aux entreprises américaines et aux membres de l’administration US d’utiliser ou de promouvoir ces services aux Etats-Unis, revient à les bannir du territoire américain (disparition des stores d’Apple et de Google pour commencer, et sans compter la fin de l’utilisation de nombreux SDK de Facebook et de Google).
Le fondement légal non explicité dans l’Executive Order serait le fait que le Comité Central de la République Populaire de Chine pourrait avoir accès aux informations personnelles que les citoyens américains confieraient à ces services. Dans les faits, la base légale semble faible (la CIA n’a pas de preuves d’une telle possibilité même si en théorie, une loi chinoise sur la Sécurité requiert de toute entreprise chinoise de “soutenir, assister et coopérer avec les travaux du Renseignement chinois.”) et Tiktok va très probablement attaquer la décision devant les Tribunaux administratifs US (ah les joies de l’Etat de droit).
Le Washington Post a recueilli quelques confidences de conseillers du Président et il semble que deux clans se soient opposés avant le décret présidentiel : les partisans d’un bannissement pur et simple du service, et ceux du rachat de TikTok par une société “bien américaine”. Microsoft a depuis fait état de discussions pour le rachat de la branche américaine (?) du service avant de se positionner sur le rachat total du réseau social pour ados qui connaît la croissance la plus importante des dernières années, et ce jusqu’à Trump réclame de façon relativement ubuesque, une sorte de “commission d’apporteur d’affaires” pour le Trésor Américain au motif que le deal n’ait été rendu possible que grâce à l’intervention du locataire du Bureau Ovale… Twitter se serait également fait connaître, faisant valoir que son acquisition serait moins problématique d’un point de vue concurrentiel…
Le sujet est passionant car aux confluents de la géopolitique, de la guerre économique et de la technologie. Gageons en effet que ce point chaud ne soit qu’une des prémices qui vont émailler la chronique tech des prochaines années, à mesure que la Chine soit, grâce à sa puissance économique et militaire, de plus en plus présente dans les économies occidentales (la capitalisation boursière de Tencent dépasse celle de Facebook).
Un essai publié en novembre 2019 sur BuzzFeed esquissait sous forme de fiction, un monde où les dirigeants politiques du “tiers-monde” (hors US et Chine s’entend) auraient à choisir entre un internet US aux mains de sociétés privées capitalistes supposés ne pas entraver la liberté d’expression, mais susceptible de laisser proliférer les fake news, ou un internet chinois obéissant aux injonctions d’un pouvoir central où l’identité et les agissements de chaque individu sont connus. L’essai illustre également la difficulté pour des sociétés privées occidentales d’embrasser des idées contraires au pouvoir chinois en place :
En 2018 seulement :
Gap apologized for selling a T-shirt in Canada that featured a map of China without Taiwan;
Marriott apologized for listing Tibet and Taiwan as countries on a customer survey;
Daimler apologized for using a quote from the Dalai Lama in a social media post;
Several US airlines acceded to Chinese demands to remove references to Taiwan, Hong Kong, and Macau from drop-down menus of countries on their websites.
En 2019 :
Givenchy, Versace, and Coach lost all-important Chinese celebrity brand ambassadors after releasing T-shirts that listed Hong Kong, Macau, and Taiwan as separate countries. They all apologized.
Activision Blizzard not only apologized — it even punished an esports player for expressing support for the Hong Kong protesters; it promised, on the Chinese microblogging site Weibo, to “resolutely safeguard the country’s dignity.”
Le débat ne fait que commencer.
Lire l’article de synthèse du WaPo
L’été, on s’inscrit aussi 😎
Si cette version allégée du Wrap Up vous intéresse, je ne saurais que trop vous conseiller la version “longue” 5 bullet points des Wrap Ups réguliers.
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Dénoncé 📢 : qui dit le Vrai sur les réseaux sociaux ?
C’est une chronique du sociologue québecois, Mathieu Bock-Coté* dans le Figaro qui ravive le débat : qui dit la vérité sur les plates-formes sociales ?
A mesure que les réseaux sociaux prennent une place de plus en plus importante comme source d’information des Français, la pression du public (et des politiques) sur le contrôle de la véracité des informations qui y circulent est de plus en plus forte. Pour y répondre, la plupart des plates-formes et Facebook la première d’entre elles, ont passé des accords avec des médias dits sérieux pour s’appuyer sur leur cellule de fact-checking pour les aider à y voir clair (petit inventaire sur le site de l’INA).
Ce que dénonce Mathieu Bock-Côté, conservateur et pourfendeur du multiculturalisme, ce sont les biais idéologiques que ces cellules d’investigation portent en elles. Le cas en présence est celui d’un amendement voté en avril dernier en première lecture de la future loi de Bioéthique, qui ouvre l’accès à l’interruption médicale de grossesse (IMG) - intervention médicale qui peut se pratiquer jusqu’au neuvième mois de la grossesse- aux cas de “détresse psychosociale” de la mère.
Jean-Pierre Denis rédacteur en chef du catholique magazine La Vie, s’est ému du fait que cet amendement puisse être une voie pour contourner les règles en vigueur concernant l’IVG (jusqu’au 3ème mois de la grossesse). Le commentaire de Denis a été “flaggué” et censuré sur Facebook sur indication de Checknews.fr (la cellule de Libération) sans que ce premier n’ait été contacté ou même informé de cette mention infamante sur son post “relaie une information « partiellement inexacte »”.
Le polémiste met en garde avec une certaine verve contre ce genre d’action :
Les « vérificateurs » ne sont pas toujours neutres et certains se comportent objectivement comme une police de la pensée. Souvent, cette dernière a pour fonction d’empêcher de dire ouvertement ce que le régime cherche à faire discrètement, sans l’avouer, sans l’assumer. On retrouve la question des formes nouvelles de la censure et du dispositif qui rend possible son application. Les réseaux sociaux ont contribué un temps à désenclaver l’espace public d’un système médiatique autoritaire qui entend tenir le débat collectif dans des paramètres très serrés. Mais certains journaux, aujourd’hui, au nom de leur «crédibilité médiatique» s’emploient en réalité à reprendre le contrôle du débat public. À travers eux, le régime diversitaire retrouve le pouvoir de désigner les contradicteurs légitimes et ceux qui ne le sont pas.
Comme dans tout système de pouvoir et de contre-pouvoir, la question sur les réseaux sociaux reste entière : qui contrôle le contrôleur ?
Lire la tribune de Mathieu Bock-Côté dans le Figaro
Lu 📖 : Le Chien Jaune de Simenon
C’est un petit Maigret, petit mais puissant : une série de tentatives de meurtre à Concarneau sous le ciel de novembre : les dialogues sont tranchants comme du Céline, Maigret flegmatique à souhait, la démarche de celui qui en a vu d’autres et plein d’humanité envers un chien jaune et les petites gens que la vie n’a pas gâtés.
Comme disait un grand critique sur Simenon : quand on lit du Simenon, ca sent la potée aux choux. Ici ça sent le goémon séché, mais le plaisir n’en ait pas moins là :-)
Extrait de la page 100 du livre :
🙏 Merci de votre lecture :
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