Le Wrap Up de la semaine où la Cour Suprême US a eu le projet de revenir sur l'avortement comme droit constitutionnel (semaine du 2 mai 2022)
5 bullet points sur les médias, la tech avec une pointe de culture à la fin
Au sommaire de cette semaine :
Attentionnée 👀 : l’économie de l’attention en décélération
Télévisé 📺 : le streaming vidéo, nouveau diffuseur TV ?
Chamboulé 🐦 : les premières pistes pour le nouveau Twitter selon Musk
Mesuré ⌚️ : comme le Quantifier Self peut nous aider vraiment à mourir vieux
Outre-manche💂♂️: Exposition Raphael à la National Gallery
Attentionnée 👀 : l’économie de l’attention en décélération
La fête est finie, c’est du moins ce que l’on pourrait penser à la lecture de cet article d’Axios Media au sujet de la dégringolade des valorisations des entreprises dites de l’économie de l’attention (Facebook, Netflix Tiktok, Disney ou encore Spotify).
Après des progressions du nombre d’abonnés et de l’engagement des utilisateurs pendant le confinement, un certain nombre d’investisseurs avaient fait le pari que rien ne serait plus comme avant et qu’on ne reviendrait plus en arrière, tirant le trait de la croissance à l’infini pour ces acteurs “médias”.
Cette période semble révolue, si l’on en juge par l’ampleur de la correction que subissent ces valeurs en bourse depuis le début de l’année.
La plus sévère correction est sans nul doute celle de Netflix dont on a déjà parlé et dont les responsables financiers ont juré la main sur le coeur qu’ils allaient s’imposer davantage de “discipline financière” dans le Wall Street Journal;
Spotify qui connaît la croissance la plus faible de son nombre d’abonnés payants se récrimine à son tour de la sévère correction subite cette semaine et fait valoir pour rassurer qu’il n’est pas netflix, qu’il n’est qu’un passe-plat pour les majors de la musique, qu’il ne s’est pas risqué à devenir éditeur (curieuse défense);
Facebook qui avait mis un orteil dans le monde du podcast, annonce un an plus tard qu’il mettra un terme à son initiative. Zuckerberg cherche ainsi à rassurer les marchés et indique clairement qu’au vu de la croissance actuelle, il allait « ralentir le rythme de certains de ses investissements. »
Télévisé 📺 : le streaming vidéo, nouveau diffuseur TV ?
Avec l’annonce de forfaits financés en partie par la publicité pour Netflix et Disney+, Digiday (reprenant les termes de Brad Stockton, SVP US Video Innovation chez Dentsu) considère que les plates-formes de streaming rentrent dans une nouvelle ère : celle des nouveaux diffuseurs TV.
Ces deux plates-formes rejoindront les HBO Max-Discovery+, Hulu, Peacock et Paramount+ en tant que diffuseurs de programmes financés par la pub, ce qui nous ramène un peu en effet à la situation ex-ante…
Ces annonces sont de nature à mieux identifier ces supports pour les annonceurs et donner ses lettres de noblesse à la catégorie du FAST (Free Ad Supported Streaming TV), si des statistiques agrégées arrivent à être produites (la plupart des acteurs vont y avoir intérêt), cependant ce nouveau marché présente pour les annonceurs, le risque de recréer un marché de l’offre à l’intérieur du streaming…
Néanmoins ce concept même s’il recrée un environnement familier avec une offre de TV limitée, néglige les autres initiatives comme PlutoTV, The Roku Channel ou encore le service d’Amazon, Freevee, même si ces services sont plus assimilés aux traditionnelles chaînes du câble et du satellite, avec leurs rediffs sans fin et programmes un peu moins premium.
Cependant, qu’on relativise : au Q1 2022, seuls 20% des foyers US avaient recours à ce type de services de streaming (alors que 80% des foyers US étaient abonnés à une offre payante de streaming?!).
On peut, enfin, faire confiance aux Youtube TV et autres TikTok pour venir perturber ce jeu de recomposition, en arguant d’une place à la table (enfin plutôt de servir d’alternatives, y compris en termes de prix aux services de streaming des broadcasters).
Une petite précision de taille : tous les opérateurs TV qui développent leur système de streaming vidéo financé par la pub, sont en phase d’investissements et perdent actuellement de l’argent : en témoigne la publication des chiffres du groupe Paramount (PlutoTV, mais aussi Showtime, BET+ et Noggin, et bien sûr Paramount+) qui a affiché des pertes de près de 500 M$ au Q1 pour ses services de streaming.
Chamboulé 🐦 : les premières pistes pour le nouveau Twitter selon Musk
D’après un article du Daily Mail (dont il faut parfois prendre les informations avec des pincettes), Elon Musk aurait dévoilé à des investisseurs ses projets pour le “Nouveau Twitter” qu’il veut retirer de la cote si son OPR fonctionne.
Il ambitionne de multiplier par 5x le chiffre d’affaires à 26,4 Md$ d’ici 2028 (vs 5 Md$ l’an dernier).
Les revenus publicitaires passeraient certes sous la barre des 50% mais en augmentant significativement (de 5 à 13 Md$) suivant la courbe des utilisateurs :
Musk anticipates Twitter’s total number of users will grow from 217 million at the end of last year to nearly 600 million in 2025 and 931 million six years from now.
La diversification des revenus s’opérant notamment par le biais :
d’un boost des abonnements à Twitter Blue, avec près de 68M d’abonnés qui paieraient 3 dollars par mois pour personnaliser leur usage de la plateforme;
de la monétisation des données (personnelles ?) de la plateforme;
des paiements InApp qui seront développés, passant de 15 petits millions de dollars en 2023 à près de 1,3 Md$ en 2028 (on peut faire confiance à l’ancien de Pay Pal pour avoir deux trois idées sur ce sujet). Musk a déjà commencé à planter des banderilles la semaine passée en s’attaquant à son tour à l’Apple Tax;
Du côté des dépenses, il prévoit dans l’immédiat 1000 suppressions de postes, sans doute la charge du siège social à San Francisco, pour lequel l’agitateur avait sondé ses 80m d’abonnés pour leur demander s’il ne fallait pas, maintenant que la présence dans les locaux était définitivement optionnelle, le convertir en centre pour les sans-abris (90% de réponse positive). Il a aussi indiqué vouloir embaucher à horizon trois ans, pour faire passer les effectifs à 13 000 personnes (actuellement 7 500).
Ne perdons pas de vue que son rachat est notamment financé par une partie de dettes remboursables par la société (dans les alentours de 13 Md$), imposant une amélioration rapide des marges en restreignant les capacités d’investissement. Cette semaine nous avons appris le nom des fonds qui sont venus apporter leur concours à cette entreprise de rachat (y compris la plateforme de finance décentralisée centralisée Binance à hauteur de 500 M$).
Mesurés ⌚️ : comme les killer apps de la santé vont nous aider vraiment à rester en vie plus longtemps
“La vieillesse est un naufrage”, disait De Gaulle, mais les chansonniers s’empressaient d’ajouter qu’on n’avait pas trouvé d’autres façons de ne pas mourir jeune.
Cette semaine, le dossier trimestriel Technology Review de The Economist se penche sur le Quantified Self et ses bienfaits pour l’être humain.
Avec la démultiplication du nombre d’appareils que nous portons et qui se penchent en permanence sur nos constantes vitales (les Fitbits, Apple Watch et autres Withings seraient capables de capter jusqu’à 7 500 variables physiologiques et comportementales par jour), la médecine va pouvoir enfin mettre en pratique l’adage du “mieux vaut prévenir que guérir.”
La fibrilation auriculaire par exemple est responsable d’un quart des 100 000 attaques cardiaques annuelles du Royaume Uni, sa détection précoce permettrait de la traiter.
La révolution des soins par la technologie est bien en marche et va se concrétiser sur trois axes :
des diagnostics précoces;
des traitements personnalisés;
et la gestion au long cours des maladies chroniques.
Pour les diagnostics précoces, nos appareils connectés arrivent déjà à détecter les changements dans la démarche des personnes âgées et les premières pertes d’équilibre. Les premiers signes de Parkinson sont également décelables dès les premiers cas de tremblement. Ainsi des renforcements musculaires pourront être prescrits pour éviter chutes et hanches cassées. Un usage compulsif du smartphone (sans en connaître nécessairement la teneur) pourra également être annonciateur d’une fragilité psychologique. Une bague Oura pourra également être prédicteur du cycle de fécondité d’une femme, voire même de grossesse une semaine après la fécondation, prévenant les futures parturientes sur leur consommation d’alcool ou de tabac.
Concernant les traitements personnalisés, il est admis que les prescriptions médicales sont efficaces, d’après l’article, uniquement dans 30 à 50% des cas ! Le tracking des réactions physiologiques à la prise de médicaments permettra de rapidement savoir si les effets escomptés se manifestent et d’ajuster les prescriptions.
Enfin, sur les maladies chroniques, on estime à 80% des maladies qui pourraient être empêchées par la modification de notre façon de vivre. Nos coachs dématérialisés pouvant par l’effet du nudge être bien plus efficace qu’un époux ou une épouse, ou encore qu’un coach personnel occasionnel, concernant nos mouvements, notre sommeil ou notre alimentation.
La tech semble désormais mature pour être déployée à grande échelle : près de 200M de tels appareils de santé ont été vendus en 2020, près du double est attendu pour 2026. Près d’un Américain sur 4 en possède déjà un.
D’ici un an ou deux, les montres connectées pourront même mesurer au niveau de l’épiderme sans être invasif, la concentration de sucre dans le sang, l’alcoolémie ou encore le niveau d’hydratation (ou encore des choses plus élaborées comme différents indicateurs d’inflammation, de dysfonctionnements du foie ou des reins).
Évidemment, avec de telles promesses de progrès, les inquiétudes s’amoncellent à l’horizon : comment les fabricants, les assurances ou les gouvernements manipuleront ces vastes champs de données sans nuire aux individus? Un risque de renforcement des inégalités sociales sera aussi dans toutes les têtes (bien qu’on puisse aussi envisager par ce biais une réduction du fossé médical avec l’accès à de la prévention).
Et toutes les belles promesses de réduction des coûts ne contreviendraient-elles pas aux intérêts de puissants lobbies pharma, dont peut être certains médicaments n’ont pas les portées sanitaires promises? Il faudra aussi que la santé publique ne se trouve pas à nouveau menacée de privatisation rampante sous la contrainte de l’investissement nécessaire pour accomplir la mise à niveau, investissement qu’un système public exsangue ne pourra pas produire.
Extra Burrito 🌯 : la renaissance de la Formule1 grâce à Netflix
Si vous vous intéressez au sport, à la TV, il faut lire ce thread sur comment LibertyMedia a racheté la propriété de la Formule1 et à retourner totalement ce sport (en particulier aux US et sur les jeunes) grâce au social media et à la puissance marketing de Netflix :
Outre-manche💂♂️: Exposition Raphael à la National Gallery
Qu’on nous permette à la faveur d’un court séjour londonien, une recommandation un tantinet snob : pour tout voyageur ou résidant la capitale britannique d’aller, sans plus tarder (jusqu’au 31 juillet), admirer la très belle exposition à la National Gallery sur le peintre Raphaël.
Certaines de ses plus belles pièces (les portraits de son ami Baldassare Castiglione, de son “amie” La Fornarina, sans compter de sublimes rondos de madonne) y sont rassemblées, dans une volonté de mieux saisir toute la profondeur et la largeur de son art (en particulier d’intéressants projets architecturaux).
On trouvera aussi original l’approche qualifiée de “multimedia”, à savoir qui mêlait les différents supports de l’époque : les gravures, les tapisseries, les peintures et les sculptures toutes réunies, dans différents projets esquissés pour la Rome papale qui lui ouvrira grandes les portes des palais romains (en particulier la Villa Madama).