Le Wrap Up de la semaine où Jane Birkin s'est éteinte (semaine du 17 juillet 2023)
➕ Canal+ au capital de ViaPlay - 🤖 La presse US se rode à l'IA - 📺 : préparer FTV à 2030 - 🦾 L'IA Deezer anti-IA - ✝️ Retour sur les guerres de religion en Franc
Au sommaire de cette semaine dans le Wrap Up :
⌛️ Temps de lecture : 7 minutes 27 secondes
Etendu 📺 : Canal+ entre au capital de ViaPlay
⌛️ : 1 min 35 sec
Le groupe Canal+ a annoncé avoir fait l’acquisition de 12% du groupe scandinave Viaplay, souvent appelé le "Netflix scandinave".
Cette acquisition intervient alors que Viaplay est confronté à des défis majeurs, avec une baisse de 80% de sa valeur en bourse après l'annonce d'un plan de licenciement de 25% de son personnel (environ 500 employés) et son retrait de plusieurs marchés internationaux.
These layoffs include the company’s CCO for the Nordics, Filippa Wallestam, who has been a leading force behind the streamer’s output in ambitious scripted originals. Going forward, Viaplay intends on delivering approximated 10 scripted Viaplay series or movies per year and will be diving more into unscripted shows, as per the outline of the content plan for 2024. It’s a massive reduction from the previous output which included at least 40 original productions per year.
Viaplay, qui a surpris les investisseurs par un avertissement sur ses bénéfices et un remaniement de sa direction au début du mois, est potentiellement à vendre, et Canal+ pourrait profiter de cette occasion pour poursuivre son développement international.
Viaplay, un acteur majeur du streaming dans les pays nordiques, fondée en 2018, fut souvent cité comme l’exemple d’une anticipation réussie. Comme Canal+, historiquement, la plateforme était le leader de la pay TV dans les pays scandinaves (où elle continue d’éditer plusieurs chaînes) et avait anticipé l’arrivée d’autres modes de consommation.
Si bien que fort sur son marché “intérieur”, Viaplay avait lancé les chevaux pour un développement international :
Viaplay avait annoncé une entrée sur les marchés américain et canadien en début d'année 2023 (avec cependant un positionnement de niche : pour les amoureux de séries et de films internationaux, en particulier du genre Nordic noir, ces drames policiers au mise en scène sombre et réaliste).
L’acteur nordique a donc sérieusement révisé ses ambitions internationales. Désormais, seuls les pays du Nord de l’Europe continueront de bénéficier de son offre de streaming : la Norvège, la Suède, le Danemark, la Finlande, l'Islande et les Pays-Bas, qui représentent 60% des abonnements à Viaplay, sont des marchés rentables et sur lesquels le groupe peut "être compétitif à long terme", selon Jørgen Madsen Lindemann, son nouveau PDG.
Viaplay a enregistré une perte nette de 511 millions d'euros au deuxième trimestre, principalement en raison de ses problèmes internationaux et d'une forte baisse de ses revenus publicitaires.
Malgré ces défis, Viaplay revendique 7,3 millions d'abonnés fin 2022 (Canal de son côté compte 25,5M d’abonnés dont 16 M pour la France Métropolitaine, et a pris il y a quelques mois une participation majoritaire dans le bouquet SudAfricain MultiView).
Local-IA-sée 🦾 : la presse US entre deux IA
⌛️ : 1 min 48 sec
Deux nouvelles sont venus se percuter cette semaine au sujet de l’intelligence artificielle et la production d’informations locales.
A ma droite, la PQR américaine a conclu un partenariat de deux ans avec l’association American Journalism Project (AJP) afin de permettre à ses membres d’expérimenter les outils d’intelligence artificielle d’OpenAI. Cette annonce fait suite à un autre partenariat annoncé quelques jours auparavant avec Associated Press.
A chaque fois le communiqué indique des expérimentations à venir avec les outils de type ChatGPT et des garanties pour garantir la protection du droit d’auteur des institutions partenaires.
Dans le cas d’AP, OpenAI rémunérera même les auteurs pour les contenus ainsi générés.
AP firmly supports a framework that will ensure intellectual property is protected and content creators are fairly compensated for their work," said Kristin Heitmann, AP senior vice president and chief revenue officer.. AP is helping partner newsrooms adopt automation for coverage of local public safety incidents.
Dans le cas de l’AJP, OpenAI soutiendra l’effort de formation des membres associatifs de ce collectif :
OpenAI will commit $5 million in funding for local news initiatives through the AJP, which supports non-profit, local news outlets through grants and other support efforts… In addition, OpenAI will also provide up to $5 million worth of credits that can be used by AJP's portfolio companies to access its tech products.
A ma gauche, autre son de cloche, Google et son AI, BARD, parlent aussi à la presse, mais plutôt aux directions de ces groupes, pour tester l’automatisation de la production de contenus locaux :
Google is testing a product that uses artificial intelligence technology to produce news stories, pitching it to news organizations including The New York Times, The Washington Post and The Wall Street Journal’s owner, News Corp, according to three people familiar with the matter… The tool, known internally by the working title Genesis, can take in information — details of current events, for example — and generate news content, the people said, speaking on the condition of anonymity to discuss the product…
Google believed it could serve as a kind of personal assistant for journalists.
Il est vrai que Google a toujours eu très à cœur de faciliter le travail des journalistes…
Jeff Jarvis un des papes du journalisme numérique a un avis plus réservé :
“If it is misused by journalists and news organizations on topics that require nuance and cultural understanding,” he said, “then it could damage the credibility not only of the tool, but of the news organizations that use it.”
Bien sûr, ces deux nouvelles sont un peu caricaturales et Sam Altman fait ses meilleurs efforts actuellement pour apparaître comme l’ange gardien de l’IA, alors que Google, compte tenu de ses antécédents, est plutôt vu comme légèrement en retard dans la course aux IA génératives et pourrait voir son business model menacé par la révolution du search qu’introduisent les IA génératives.
Le débat ne fait que commencer.
Remarquée 📺 : préparer FTV à 2030
⌛️ : 1 min 38 sec
Lors de sa conférence de presse de rentrée, le 11 juillet dernier, la direction de France Télévisions a déroulé plus qu’une conférence des programmes, mais une vision stratégique à 2030 :
Le groupe a ainsi dévoilé ses priorités pour la saison 2023-2024, autour de l’information, du documentaire, de la jeunesse, des territoires, et aussi autour des Jeux Olympiques, dont il sera le diffuseur officiel l’été prochain. Une feuille de route conçue alors que le contrat d’objectifs et de moyens (COM), qui fixe l’enveloppe budgétaire disponible, demeure en discussion aujourd’hui.
A 56 minutes de la vidéo, Delphine Ernotte parle de la révolution des usages. Elle a rappelé que pour l’ensemble de la population, la TV reste surpuissante : 26M devant un poste de TV à 21h.
Cependant pour les moins de 25 ans, la vidéo est omniprésente sur l’ensemble de la journée, la TV la devance d’une courte tête au début du prime time.
Pour tenter de renouer avec ce public jeune, l’audiovisuel public propose différents moyens :
Triplement des investissements à trois ans des contenus pour les moins de 30 ans en s’appuyant sur les plates-formes maison existantes : Okoo (pour les plus jeunes) et Slash (pour les ados);
Confection d’un journal télévisé à destination des 12-18 ans qui sera rediffusé sur la chaîne franceinfo;
Utiliser Paris 2024 pour reconnecter les jeunes publics avec leur audiovisuel public avec un dispositif particulier pour les jeunes publics;
“D’ici fin de la décennie, la TV sera 100% numérique, 100% applicatif” affirme Ernotte, c’est donc en cohérence qu’elle souhaite unifier sa plateforme de marque : “la puissance est clé, la dispersion est mortifère.”
A l’automne, FranceInfo et France.TV deviendront donc les marques uniques en digital.
Après les JO, ce sera aussi le cas des marques antennes, sans que l’on soit certain que ce soit la marque France.tv qui soit retenue.
Elle tend aussi la main aux acteurs privés dans son combat pour continuer de faire exister la singularité des médias français.
Elle souhaite continuer, pour ne pas marcher sur leurs plates-bandes, à créer des indicateurs spécifiques pour l’audiovisuel public : passer de la DEI (durée d’écoute individuel) à une mesure de l’impact des programmes (jeu sur la mémorisation?) peut être dans la même veine de la tentative d’il y a quelques années, où la régie de FTV avait tenté de substituer la part d’audience (pda) à la part d’audience de qualité (pdaQ) (en ajoutant une note qualitative aux programmes).
Appel à la “réconciliation” (sic) avec TF1 et M6 et Canal+ autour des défis communs comme la qualité d’images Ultra HD, la préservation du modèle français de création audiovisuelle et du cinéma, faire un front commun sur … l’IA.
Art-ificielle 🤖 : Deezer dévoile sa brique IA anti-IA
⌛️ : 1 min 03 sec
Cette semaine, Deezer a dévoilé une stratégie pour lutter contre l'activité de streaming frauduleuse et la montée de la musique IA sur sa plateforme, grâce au … machine learning.
Deezer déclare qu'il construit un ensemble d'outils pour détecter le contenu généré par l’IA et vise à développer un système pour étiqueter la musique créée par l'IA générative, en commençant par les chansons utilisant des voix synthétiques d'artistes existants.
"Avec plus de 100 000 nouveaux titres téléchargés par jour sur notre plateforme, il devient de plus en plus important de privilégier la qualité sur la quantité et de défendre les vrais artistes qui créent un contenu réellement précieux", a déclaré Jeronimo Folgueira, PDG de Deezer, commentant la nouvelle technologie mise en place, dont on sait seulement qu’elle repose sur la brique “Radar” d’identification du contenu déjà à l’œuvre chez le streamer français.
Le jeu du chat et de la souris peut recommencer… sauf qu’il est fort probable qu’à l’avenir les maisons de disque elles-mêmes utilisent des outils d’IA pour accélérer la productivité de leurs artistes :
We have some other questions, starting with this idea of a clear and easily-identifiable demarcation between ‘real’ and ‘AI-generated’ music. It’s inaccurate now, and will only become more so as more assistive AI tools emerge, and as more (real) artists use them for their music or collaborate with AI music startups.
Ce combat s’inscrit également dans la perspective de Deezer et de Tidal qui souhaitent, dans un débat fructueux avec les maisons de disque, changer les assiettes de rémunération des maisons de disque et des artistes pour se départir de la seule part d’écoute (voir France Télévisions un peu plus haut et ses nouveaux indicateurs …).
Claniques ✝️ : les guerres de religion en France
Très belle exposition historique qui court jusqu’à la fin du mois de juillet au musée de l’Armée au sein du majestueux Hôtel des Invalides, sur les guerres de religion qui s’étalèrent sur pratiquement 70 ans (1559-1610).
⌛️ : 1 min 11 sec
L’exposition s’intitule la Haine des Clans. Elle illustre, salle après salle, l’empilement des haines recuites dont la religion n’est plus finalement que le prétexte, entre les différents camps pour conquérir le pouvoir en prenant l’ascendant sur le roi (ou la Régente) et comment ce dernier tente de tenir les différents partis à distance.
Ce qui est fascinant, et qui est bien expliqué sur les panneaux explicatifs, c’est ce qui joue, de la Conjuration d’Amboise jusqu’à la révocation de l’Edit de Nantes, en passant par les pacifications promulguées par le vert-galant Henri IV : la matrice de tous nos débats contemporains autour des questions de pouvoir, d’autonomie, de la place de la religion dans l’espace public, de l’ingérence des puissances étrangères, de, finalement, les conditions de notre concorde civile.
De façon assez surprenante, on y verra que les Guerres de Religion ont à la fois, par la mise en place d’une administration permettant la continuité du fonctionnement de l’Etat (les intendants et surintendants envoyés dans les provinces pour faire respecter la paix du roi, veiller à ce que les places fortes soient bien rendues, que les parlements enregistrent les édits royaux), préparé le règne de l’absolutisme du XVIIème siècle, et à la fois, par l’introduction des notions de liberté de conscience, de coexistence pacifique de communautés différentes, de concorde civile, de remise en cause de la centralité du pouvoir (deux régicides pendant cette période tout de même!), annoncé les droits de l’homme et du citoyen.
On y voit beaucoup d’armures, musée de l’armée oblige, mais aussi beaucoup de libelles, ce qui amorce aussi la réflexion sur la place de la technologie (ici l’imprimerie) dans la propagation des nouvelles idées (ainsi qu’à parité des fausses rumeurs) … car cette guerre est aussi une guerre des idées.