Le Wrap Up de la semaine avant le second tour des législatives (semaine du 1er juillet 2024)
📔 : La presse et les mooks? - 💃🏽 : La premiumisation des concerts - 🎂 Amazon trentenaire - 🖐️: le bon écart d'âge d'un couple - 🖼️ : 1874 inventer l'Impressionisme
Au sommaire de cette semaine (et en rattrapage des précédentes)
⏳ Temps de lecture : 8 min 46 sec
Attablés 📔 : la presse se sauvera avec les mooks?
Dans un monde dominé par les écrans et l'immédiateté numérique, certains périodiques Adventure Journal, Mountain Gazette, Summit Journal et Ori, continuer de trouver un succès sur papier.
Ces magazines traitant de la vie en plein air, ils ont la caractéristique d’être indépendant et produit en petites séries, ils sont particulièrement prisés par un public séduit par l’idée de décrocher de leurs téléphones et de revenir à des expériences plus tangibles.
Adventure Journal (7 200 exemplaires) créé par Stephen Casimiro, ancien rédacteur de Powder (traitant du ski hors piste) et de National Geographic Adventure, incarnerait selui lui “un retour à l'analogique en réaction à la fatigue numérique.”
“People will have this in their hands, on their coffee table,” Casimiro said. “That was the idea. We’re all exhausted from our screens. We want something to savor.”
D’autres magazines spécialisés prospèrent aussi aux US, en offrant des contenus de haute qualité, échappent à la publicité envahissante et privilégient un lectorat fidèle et passionné, même si réduit.
Ces publications sont souvent luxueuses, avec des finitions mates et des photographies qui couvrent intégralement les pages, transformant chaque numéro en objet de collection plutôt qu'en simple lecture éphémère, destiné à rester sur la table basse en objet de décoration (les fameux coffee-table books).
À Seattle, Kade Krichko, fondateur d'Ori, parle d’un mouvement de « lecture lente », tandis qu'à New York, Michael Levy a relancé Summit sous le nom de Summit Journal, avec une vision axée sur la curation de contenus de qualité plutôt que sur la production massive d'articles. Dans le Nevada, Mike Rogge a ressuscité le Mountain Gazette en adoptant une approche similaire.
Le succès de ces magazines repose sur une combinaison de facteurs : un public cible restreint mais dévoué, une production majoritairement artisanale, et une distribution qui s'appuie autant sur le bouche-à-oreille que sur les compétences numériques de leurs créateurs pour toucher une audience plus large.
Debbee Pezman, 69 ans, cofondatrice de The Surfer’s Journal, considère son magazine plus comme un livre bimensuel, avec une attention méticuleuse portée aux détails et une qualité irréprochable. Leurs efforts pour maintenir une haute qualité se reflètent également dans les nouvelles entrées sur le marché, poussant les standards toujours plus haut.
The Surfer’s Journal persists as envisioned, now with about 28,000 subscribers (six issues a year for $84, or $25 for one) and eight “sponsors” (each paying $70,000 per year). Thousands of other copies are sold in surf shops and bookstores. The company has expanded into books, a popular podcast and The Golfer’s Journal, with manicured green grass taking the place of swelling blue oceans. It has about two dozen employees, including those who handle circulation from company headquarters.
Ce retour aux magazines imprimés s'inscrit dans une quête plus large de qualité et d'authenticité, similaire à celle observée avec le renouveau du vinyle ou des bières artisanales. Ces publications ne cherchent pas simplement à survivre dans un monde numérique, mais à offrir une alternative riche et soigneusement conçue, prônant une consommation de contenu plus réfléchie et moins frénétique.
En France, depuis le lancement de la revue XXI en 2008 (placé en redressement judiciaire en 2023), de nombreux mooks sont venus pour profiter de cet espace hybride, et pour profiter d’une distribution en librairie dans laquelle le réseau de distribution reste dense. Plus récemment, ce sont encore trois titres qui se sont lancés (Kometa sur l’Europe de l’Est, Portfolio sur la photographie ou Estrange sur le sujet de l’étranger et du surnaturel).
Cher 💃🏽: la premiumisation des concerts
Les concerts non contents d’avoir connu, peut être avec des comportements anticoncurrentiels, une inflation sans précédent, a encore des marges de progression !
Des packages tendent à premiumiser encore davantage les petits plus à côté de l’expérience concert : parkings VIP, toilettes privées à deux pas, et un service de restauration directement à son siège, offrant des sandwiches et des tacos bulgogi coréens.
De nombreux riches amateurs de concerts recherchent désormais des expériences de luxe, alors que le secteur des événements connaît une croissance exponentielle.
Au-delà de la simple billetterie, les revenus des concerts live devraient atteindre 35,1 milliards de dollars cette année et s'envoler à 51,7 milliards d'ici 2030.
Face à cette manne, les promoteurs, à l’instar de Live Nation, ne cessent de peaufiner leurs offres VIP : le SoFi Stadium à Los Angeles propose une gamme variée de suites et de services exclusifs, incluant bars à tequila et à champagne. L'offre est si prisée que le stade a même transformé sa loge de presse en un espace VIP durant les concerts.
Et en Europe? Le Montreux Jazz Festival, qui attire l'élite mondiale avec des packages pouvant inclure des vols charter et des suites hôtelières de luxe pour des sommes avoisinant les 20 000 dollars ? Ces expériences montrent que le luxe a définitivement sa place dans l’univers du spectacle live, un marché de plus en plus segmenté où l'expérience "argent contre exclusivité" semble être la nouvelle norme.
Cependant, cette course à l’exclusivité n'est pas sans risque. Alors que certains artistes voient leurs ventes de billets ralentir, suggérant une saturation possible du marché, la demande pour les places premium reste forte. Selon Jessica Reif Ehrlich, analyste chez Bank of America, ce segment haut de gamme continue de tirer le marché, même si les spectateurs moins aisés se font un peu plus rares.
Trentenaire 3️⃣0️⃣ : Amazon pour les 30 prochaines années?
Le 5 juillet, Amazon a fêté ses 30 ans : trente années où la firme montée par Jeff Bezos n’a cessé de définir le paysage du commerce électronique et de la technologie.
Ses ventes devraient atteindre 554 Md$ cette année (aux seuls Etats-Unis), représentant une part dominante de 42% de l'e-commerce américain, Amazon dépasse largement son plus proche concurrent en ligne, Walmart. Mais l'ambition d'Amazon ne s'arrête pas à la vente aux particuliers.
Amazon a su également innover en lançant des produits propres : le Kindle, l'enceinte intelligente Alexa, et surtout Amazon Web Services (AWS), qui domine 31% du marché du cloud computing, estimé, excusez du peu, à 300 milliards de dollars.
Avec Prime Video, Amazon se classe quatrième parmi les services de streaming vidéo les plus regardés aux États-Unis, et son entreprise de publicité en plein essor se positionne juste derrière Alphabet et Meta.
Le véritable cadeau d'anniversaire pour Bezos cette année fut de voir la valeur de marché de son empire technologique dépasser les 2 000 milliards de dollars pour la première fois. Mais au-delà des célébrations, cette étape soulève bien sûr des questions stratégiques sur l'avenir de l'entreprise. Sur la complexité de la pieuvre Amazon, des voix s'élèvent pour suggérer une scission d'AWS, dans l'espoir de valoriser davantage les actionnaires (c’est oublié que la rentabilité est tirée par cette activité et permet de continuer la conquête de part de marché à quasi-perte).
Sous la direction d'Andy Jassy, successeur de Bezos depuis 2021, Amazon semble toutefois privilégier l'intégration plutôt que la scission. L'objectif est de mieux relier ses diverses branches pour générer plus de valeur, rappelant des stratégies à la Apple ou Microsoft.
Le service Prime joue un rôle central dans cette intégration : avec 300 M de membres dans le monde, Prime aide à vendre plus sur les sites d'Amazon tout en fournissant un accès à Prime Video. La connaissance que ce programme permet à Amazon d’avoir lui permet de cibler plus efficacement les publicités.
Amazon investit également massivement dans le contenu pour attirer les spectateurs sur Prime Video, avec des contrats significatifs comme celui avec le YouTubeur MrBeast ou des droits de diffusion pour la NBA et la NFL, considérés comme stratégiques pour augmenter les abonnements à Prime et les ventes publicitaires associées.
Le défi majeur pour Jassy est de renforcer les synergies entre le commerce de détail et AWS. Par exemple, AWS a aidé à obtenir les droits de diffusion de la NFL grâce à son infrastructure internet fiable, et des accords comme celui avec Hyundai intègrent AWS non seulement comme fournisseur cloud mais aussi dans la vente de voitures sur Amazon.
Le fil conducteur de ces initiatives pourrait être l'intelligence artificielle générative, un domaine où Amazon a déjà lancé des produits innovants et où il utilise ses vastes données pour former des modèles d'IA. Mais cette intégration croissante ne plaît pas à tous, notamment à cause des craintes de pratiques monopolistiques, ce qui a conduit à une action en justice de la FTC.
Malgré ces défis, Amazon continue de prospérer, ignorant en grande partie les menaces réglementaires. Mais pour éviter la fameuse crise de la quarantaine, Amazon devra prouver qu'il peut surpasser ses rivaux, notamment Microsoft et ses positions avancées en IA générative, ainsi que Walmart qui intensifie ses efforts publicitaires et e-commerce.
Distancié 🖐️ : quelle est la différence d’âge optimale entre un homme et une femme ?
Quand un ami décide de sortir avec quelqu'un qui pourrait être son parent, nombreux sont ceux qui recourent à une règle (que j’ignorais!) de "la moitié de son âge plus sept" pour jauger la pertinence de cette décision.
Bien que l'origine de cette règle reste floue, elle semble avoir traversé les générations, servant tantôt à justifier, tantôt à critiquer les relations amoureuses entre couples d’âge différent.
Selon cette règle, il est acceptable qu'un individu de 22 ans sorte avec un autre de 18 ans, mais pas qu'un trentenaire fréquente un jeune de 23 ans, quoique 26 ans serait acceptable. Plus on vieillit, plus l'écart d'âge toléré s'élargit : un quinquagénaire peut théoriquement ainsi s'aventurer jusqu'à fréquenter quelqu'un de 86 ans.
En pratique, les recherches de Christian Rudder, cofondateur du site de rencontres OK Cupid, révèlent que hommes et femmes ne partagent pas tout à fait la même vision des écarts d'âge :
Alors que les femmes tendent à rechercher des hommes de leur âge ou légèrement plus âgés, les hommes montrent une préférence constante pour les partenaires dans la vingtaine, indépendamment de leur propre âge.
Si les femmes préfèrent un écart d'âge réduit et constant, les hommes, eux, sont attirés par l'idée d'une partenaire significativement plus jeune, d'autant plus à mesure qu'ils vieillissent.
Ces choix sont-ils judicieux ? Théoriquement, un faible écart d'âge présente des avantages, comme partager des souvenirs d'enfance ou célébrer des événements de vie en même temps, ce qui pourrait renforcer les liens du couple.
Sur le plan économique, certains experts suggèrent que de plus petits écarts d'âge pourraient réduire l'écart de revenus entre les genres, surtout si on considère que les femmes ont tendance à interrompre leur carrière lorsqu'elles se marient avec des hommes plus âgés.
Toutefois, une étude danoise sur des jumelles n'a montré aucune différence significative dans les revenus des femmes mariées à des hommes de leur âge par rapport à celles qui ont choisi des partenaires plus âgés.
Les écarts d'âge influencent-ils la durabilité des mariages ? Un article de The Atlantic de 2014 mentionne qu'une différence de cinq ans augmente de 18 % le risque de divorce, par rapport aux couples d'âge similaire.
Toutefois, bien que les statistiques montrent une corrélation entre les taux de divorce et l'écart d'âge, elles ne prouvent pas de lien de causalité direct. Il semble que le type de personne choisissant un partenaire nettement plus âgé ou plus jeune puisse jouer un rôle dans ces statistiques.
En outre, choisir un partenaire plus jeune peut sembler judicieux pour vieillir ensemble, mais cette stratégie peut aussi conduire à des complications, comme le montre une étude de Sven Drefahl de l'Université de Stockholm: elle indique que les hommes mariés à des femmes plus jeunes vivent plus longtemps, alors que les femmes avec des conjoints plus jeunes ne bénéficient pas du même avantage.
Un véritable économiste irait plus loin dans la recherche de preuves solides, peut-être en analysant le bonheur conjugal de couples aléatoires avec différents écarts d'âge. Mais, heureusement pour tous, les gens sont libres de faire leurs propres choix et d'ignorer les règles arbitraires.
En France, les écarts d'âge entre conjoints sont souvent peu élevés. Dans 30 % des couples, l'homme a 2, 3 ou 4 ans de plus que la femme et dans 9 % des couples, c'est elle qui a 2 à 4 ans de plus. Dans 19 % des couples, l'homme a 5 à 9 ans de plus que sa conjointe ; la situation inverse ne concerne que 4 % des couples.
Impressionné 🖼️ : 1874, naissance d’un mouvement artistique
Ah, Paris! Le terreau fertile d'où l'impressionnisme a éclos, tout vibrant de nouveauté et de rébellion. Le 15 avril 1874, c'est dans cette atmosphère d’après guerre (celle de 1870 et la Commune de 1871) que Claude Monet et ses comparses prennent d'assaut le monde artistique alors régulé par le Salon Officiel.
Leurs armes? Des toiles, des pinceaux, et une audace sans borne. Disant adieu aux salons officiels (certains reviendront tout de même exposés les années suivantes) et prenant l’initiative d’une exposition organisée par ces artistes eux-mêmes et privées, ils jeteront les bases de ce qui deviendra l'une des révolutions esthétiques majeures.
Pour célébrer les 150 ans de cet événement, le musée d'Orsay a déployé un panorama de 130 œuvres avec un très bel accrochage, révélateur des premières lueurs de l'impressionnisme. « Paris 1874. Inventer l'impressionnisme » nous plonge dans l'aube d'un mouvement nombreux à l'origine, trente et un artistes y ont pris part, même si seulement sept noms sont passés à la postérité.
Leur message fut celui d’un art immédiat, croqué sur le vif, en plein air, capturant des scènes de la vie moderne ou des paysages baignés de lumière. Leur quête ? Capturer l'impression, l'instant éphémère, et non plus seulement l'éternel.
La nouveauté de cette exposition réside dans la mise en perspective des œuvres de 1874 avec celles, contemporaines, du Salon officiel. Une confrontation audacieuse qui non seulement montre le contraste visuel saisissant entre les œuvres des impressionnistes et celles de leurs contemporains plus traditionnels, mais enrichit également notre compréhension de cette révolution artistique par des parallèles et des recoupements inattendus.
L'exposition n'est pas qu'une rétrospective ; elle est un dialogue entre passé et présent, dévoilant les contradictions et la richesse de la création artistique de l'époque.
Pour les passionnés, les curieux, ou simplement ceux qui cherchent à comprendre l'essence d'un mouvement qui a redéfini non seulement l'art mais aussi la manière dont nous percevons le monde. L’exposition est encore visible jusqu’au 14 juillet. Elle est très bien complétée par le parcours en réalité virtuelle proposé en supplément du billet du musée.